Lali

25 avril 2007

Un décor qui n’est pas le mien

Filed under: États d'âme,Couleurs et textures — Lali @ 22:44

poetting

Tout est bien rangé. La lectrice d’Adrienne Von Poetting n’est pas de celles qui empilent ou qui lisent plusieurs livres à la fois.

Et à regarder ce décor, je ne peux penser qu’à Carl, ce vieil ami dont j’ai perdu la trace. Carl vivait alors dans un appartement où tout était impeccable. Jamais une tasse dans l’évier, jamais un journal sur la table à café, le lit toujours fait, les serviettes bien pliées. Sa mère pouvait venir le visiter n’importe comment : le fils avait retenu sa leçon. Elle pouvait être fière de lui.

Mais il s’ennuyait dans son appartement bien astiqué. Et comme il habitait à un paté de maisons, il débarquait pour un oui ou pour un non. Pour une bière ou un café. Mais surtout pour être dans un lieu qui lui paraissait habité. Il le disait tout haut. Il aimait mes piles. Il aimait qu’il y ait des livres partout. Il aimait que ça sente la vie. Et rien n’a changé depuis cette anecdote qui remonte à vingt ans. Les piles sont toujours là et je ne me fatigue pas à plier les serviettes bien comme il faut chaque fois que je les utilise. Si je le revoyais, il me reconnaîtrait dans cette façon d’être en vie, c’est-à-dire éparpillée et ramasseuse.

Carl a-t-il fini par habiter un lieu, à y laisser sa trace ou a-t-il continué de vivre dans son décor où rien ne retrousse ? Ou sommes-nous déjà à 20 ans ce que nous serons toujours ?

Dans les livres

Filed under: États d'âme,Couleurs et textures — Lali @ 21:20

emile bernard

Lui arrive-t-il d’avoir envie, tandis qu’elle lit, que quelqu’un la connaisse si bien qu’il pose une tasse de café devant elle sans qu’elle n’ait à le demander ? Lui arrive-t-il aussi d’imaginer les bras d’un homme autour d’elle, quelques minutes, tandis qu’elle tourne les pages, ce même homme qui la laisserait à son livre parce qu’il est heureux de son bonheur et qu’il n’y verrait pas là un instant qu’elle lui vole ?

Ces images que je glisse dans l’esprit de la lectrice d’Émile Bernard sont-elles les siennes ou les miennes ?

Moi qui ai, pendant de longues années, profité du sommeil de l’homme pour lire, n’ai aucune idée de ce que peut être quelqu’un qui me laisserait à mes livres. Moi qui, ces mêmes années, ai quelquefois demandé des bras autour de moi, et lesquelles étreintes étaient minutées et ponctuées d’un C’est assez ?, ne sais pas plus ce que peut être la tendresse gratuite. Du moins celle qu’on imagine dans l’amour, puisqu’en amitié j’ai toujours été gâtée et sans jamais avoir à demander.

A-t-elle un parcours semblable au mien ? Ou est-ce moi qui me vois en elle ? A-t-elle connu quelque chose que je n’ai pas connu ou le vit-elle, comme moi, dans les livres ?

Le salon de la lectrice

Filed under: Couleurs et textures — Lali @ 8:17

genevieve terver noel

Il y a toujours ce moment difficile où il faut partir, où il faut quitter la pièce où s’entassent les livres et les tableaux. Il y a toujours cette minute où elle jette un dernier regard sur la pièce avant de fermer la porte.

La lectrice de Geneviève Terver-Noël est là, mais on ne voit que ce qu’elle voit et non pas elle. Cette pièce à laquelle elle dit au revoir tous les matins. Et qu’elle retrouve le soir, comme d’autres retrouvent un mari ou des enfants.

Le livre à l’envers

Filed under: Couleurs et textures — Lali @ 8:07

shi mo

Quand on l’a appelée, la lectrice de Shi Mo a laissé ouvert le livre et l’a mis à l’envers pour retrouver sa page plus tard. Elle fait toujours comme ça, même si on lui a enseigné qu’il est préférable d’utiliser un signet. Mais elle n’aime pas. En utiliser un, c’est fermer le livre et elle aime qu’il soit ouvert. Toujours prêt.

Or, certains ne supportent pas cette habitude qui cassent les reliures, qui font que les livres s’ouvrent à certaines pages. Certains n’aiment pas non plus qu’on plie les coins des pages. D’autres qu’on écrive dedans.

Je me rends compte que j’ai toutes les habitudes. Et pas juste une seule. Comme si certains livrent se prêtaient à une façon de faire et d’autres à une autre. Et pourtant, ce n’est pas que je n’aie pas de signet sous la main. Au contraire. Mais je ne me plie pas à cette obligation qui est celle de la majorité des gens. Je fais à mon aise. Tantôt, je fais comme cette lectrice. D’autres fois, non. Et si je cherchais à savoir pourquoi, je ne sais pas si je trouverais d’autre raison que l’humeur du moment.

Sur la route de l’école

Filed under: Couleurs et textures — Lali @ 7:36

sherban

Elles ont peut-être sorti un livre de classe sur la route de l’école, mais je préfère penser que c’est autre chose.

L’une des lectrices de V. Y. Sherban fait voir à l’autre un magnifique livre qu’on lui a offert. Un de ces livres qu’on conserve toute sa vie et qu’on devrait transmettre. Peut-être était-il à sa mère autrefois et même à sa grand-mère.

Les illustrations n’ont pas les couleurs vives de celles d’aujourd’hui. Le livre ne présente pas non plus tous ces logotypes d’aujourd’hui. Mais il a la mise en page soignée des livres d’autrefois. Et surtout, il a une histoire. Et c’est ce que l’une raconte à l’autre, en précisant lequel des contes était le préféré de sa mère, et pourquoi. Et tant pis si elles s’attardent un peu et arrivent juste à l’heure et pas plus tôt, comme elles en ont l’habitude. Elles vivent là un beau moment de partage, sur la route de l’école. De ceux qu’on ne remplace pas.