Il y a quelque chose de terriblement touchant dans le premier roman du poète Makenzy Orcel. Une humanité, une tendresse, un regard sans concession, mais attendri sur celles qu’il appelle « les immortelles », qui pratiquent « le plus vieux métier du monde », lesquelles ont disparu de la Grand’Rue de Port-au-Prince après le séisme de janvier 2010. Où sont-elles? Certaines ont-elles survécu? Où sont leurs clients, et ceux avec qui elles avaient un lien plus fort qu’un simple échange commercial?
C’est à elles, à eux, à celles qui sont là depuis toujours, à celle qui a choisi cette vie de plein gré, au prof de littérature qui les fréquente, aux témoins de cette vie d’avant, aux disparus, que le narrateur, « l’écrivain », prête voix dans Les immortelles, allant de l’un à l’autre, de l’une à lui-même, entremêlant les histoires, déroulant le fil de celles-ci, créant ainsi une toile qui se déploie en nous livrant des portraits plus vrais que nature.
Le résultat est un premier roman composé de fragments qui se répondent et s’imbriquent les uns dans les autres, unissant ainsi ces voix qui nous semblent d’abord disparates, mais qui semblent parfois n’en faire qu’une. Le cri d’une immortelle prend alors toute la place alors que la mort a pris une des siennes, celle qui aimait tant lire et qui avait choisi ce métier pour s’accorder des pauses avec Jacques Stephen Alexis, dont les livres lui tenaient lieu de maison, de rêve et d’espoir.
D’elles, d’eux, il reste une poignée d’histoires racontées ici sans fausse pudeur, à lire et relire en attendant que la Grand’Rue redevienne ce qu’elle était. Quand vivait encore celle à qui Makenzy Orcel a prêté ces mots : « Pour moi, il existe deux grands voyages. La lecture et le somptueux voyage des corps enlacés. »
Titre pour le Défi Premier Roman