Il y a 30 ans et des poussières
Quand je me suis levée ce matin de novembre 1989, j’ignorais que ce midi-là je mangerais avec Mary Higgins Clark, et que j’allais dévorer son plus récent roman qui était sur ma table de chevet, et dont la lecture était prévue pour le weekend à venir, sans tarder.
Elle Québec, qui venait de lancer son premier numéro et auquel je collaborais à l’époque, venait de me commander un court article qui relaterait ma rencontre avec la reine du crime de l’époque, Et quelle rencontre!
À l’heure où Mary Higgins Clark vient de s’éteindre, rien ne semble s’être effacé de ces deux heures où nous avons discuté sans temps mort. Comme si nous nous connaissions depuis un moment. L’auteure de La maison du guet était abordable, chaleureuse, amicale. Et tellement souriante.
Trente ans plus tard, des anecdotes me viennent en tête. Des anecdotes que j’ai envie de partager aujourd’hui. Pour qu’elles ne s’envolent jamais.
Ainsi, le fait qu’elle écrivait la nuit, assise sur le plancher de la cuisine, un tapis la recouvrant entièrement afin d’étouffer le cliquetis de la machine à écrire pour ne pas troubler le sommeil de ses jeunes enfants. Ou ce rêve qu’elle a concrétisé, qui est celui de toute Irlandaise née à Brooklyn, d’avoir un jour un appartement avec vue sur Central Park. Ou encore son goût prononcé pour le vert qui était souvent la couleur des yeux de ses héroïnes.
Je me souviens de ses yeux pétillants, de cette passion pour la vie dans laquelle elle mordait visiblement, de son amour pour les siens, de son bonheur d’être à Montréal afin d’y rencontrer ses lecteurs et lectrices. Je me rappelle la séance photo qui a suivi, à laquelle elle voulait que j’assiste, et notre complicité du moment.
Il y a près de 15 ans que je ne lisais plus ses livres. Mais il me plaisait de savoir que l’âge ne l’avait jamais arrêtée et que chaque année, elle était fidèle au poste avec une nouvelle intrigue qui ne manquerait pas de plaire.
Je ne l’oublierai jamais, je crois.
*toile de Birgit Stern