Comme s’il n’était pas suffisant que je me batte toute la journée contre les calques de l’anglais, les coquilles et les fautes de frappe qui truffent les documents que je dois réviser, il faut en plus qu’on m’agresse sur les sites Web que je fréquente. Pas physiquement, il va sans dire. Pas verbalement. Et pas directement.
Je vais vous expliquer.
Trois personnes sur quatre ne savent pas qu’on ne réfère pas un patient à un spécialiste, mais plutôt qu’on le dirige vers celui-ci. Encore plus ignorent que langage et language sont des faux amis et que toutes les opportunités n’en sont pas, que supporter quelqu’un, ce n’est pas le soutenir, mais l’endurer, pas toujours de bon cœur.
Je passe mes journées à corriger de telles fautes. Et je vous en passe des pires et des meilleures, sinon ça ne sera plus un billet mais une anthologie que je vais devoir écrire. Mais bon, là n’est pas la question. S’il y a parfois des glissements de sens, des oublis de prépositions, des pluriels qui se faufilent inopinément dans une lettre ou une bannière publicitaire alors que des féminins s’emparent de mots qui n’en possèdent vraiment pas le genre (cantaloup, sandwich, autobus, pour ne nommer que ceux-là), les gens qui me soumettent des documents comprennent en général ce qu’ils écrivent et n’affirment pas le contraire de ce qu’ils pensent par méconnaissance de la langue française.
Or, quand on répond à quelqu’un qui vient de nous remercier pour un geste gentil par « je te rends juste la monnaie de ta pièce », autant que je sache, cela n’a rien de gentil. Loin de là. Je l’ai pourtant lu à l’instant, pour la seconde fois cette semaine.
Ce n’est pas moi qu’on a agressée, j’en conviens. Mais quand la langue française est ainsi galvaudée, je n’ai qu’une envie : la défendre. Mais pour une Lali au combat, combien de ceux dont le français est la langue maternelle ont baissé les bras sous prétexte que c’est une langue difficile?
*illustration de Daniela Ballestra