Les mots de Marie 1
La lectrice de Dariya Afanaseva a pris goût au poème du soir, au recueil laissé ouvert pour que d’autres trouvent les mots avec lesquels elle s’est endormie. D’abord avec le numéro de la revue Estuaire qu’elle a laissé ouvert neuf fois pour des Extraits quotidiens, puis avec Le recueil de Rosa Alice Branco, intitulé Épeler le jour, onze fois laissé à qui voudrait lire des exraits. Tellement pris goût à la chose qu’elle ira d’un recueil à l’autre soir après soir. Pour son plaisir. Pour le partage. Qu’elle se promènera dans les livres qui la suivent depuis toujours autant que dans ceux tout nouveaux découverts par hasard ou offerts.
L’outre-vie de Marie Uguay est un de ceux auxquels elle revient depuis près de trente ans. Comme on revient à l’essentiel, à la grandeur des sentiments et à la simplicité des mots. L’outre-vie qui s’ouvre ainsi :
L’outre-vie c’est quand on n’est pas encore dans la vie, qu’on la regarde, que l’on cherche à y entrer. On n’est pas morte encore mais déjà presque vivante, presque née, en train de naître peut-être, dans ce passage hors frontière et hors temps qui caractérise le désir. Désir de l’autre, désir du monde. Que la vie jaillisse comme dans une outre gonflée. Et l’on est encore loin. L’outre-vie comme l’outre-mer ou l’outre-tombe. Il faut traverser la rigidité des évidences, des préjugés, des peurs, des habitudes, traverser le réel obtus pour entrer dans une réalité à la fois plus douloureuse et plus plaisante, dans l’inconnu, le secret, le contradictoire, ouvrir ses sens et connaître. Traverser l’opacité du silence, inventer nos existences, nos amours, là où il n’y a plus de fatalité d’aucune sorte.