Lali

31 mars 2008

Extraits quotidiens 4

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:58

gashar 2

C’est lui qui lui a tendu le numéro de la revue Estuaire. Après trois jours, il a pris goût à ce petit moment où elle lui lit un poème qu’elle aime. De sa voix douce et chaude. Aimante et tendre. Si bien que la lectrice peinte par Gashar a retiré un des signets qu’elle a soigneusement disposés et qu’elle s’est mise à lire.

les effluves du désir
déferlent
plus pressées
à chaque étape
de la traversée
et chaque effusion
me ramène à ta peau
par les replis des fièvres qu’elle active
chaque étreinte abolit son lot de timidités
chaque odeur renomme
au gré de ces envoûtements
les délices des caresses déposées ça et là
sur des mystères tout juste dévoilés

tu donnes leur allure aux gestes
puis tu précipites au creux des mouvements
l’envie d’ajouter à la saveur
des festins déjà suscités
les harmonies d’une musique née du corps
qui retourne au corps

(Dominique Lauzon)

Ceux qui écrivent

Filed under: États d'âme,Couleurs et textures — Lali @ 20:39

stoyanova

J’ai toujours aimé regarder ceux qui écrivent. Dans les cafés, dans les parcs, dans les bibliothèques. Depuis toujours. Peut-être parce que je le fais moi-même et que j’aime que d’autres le fassent, que ce soit à cause d’une idée soudaine, d’une inspiration qui va durer un moment ou par habitude.

Il y a dans les gestes de celui ou celle qui écrit de l’application. De la concentration. Et cette volonté inconsciente de ne plus appartenir au monde autre que celui des mots. De ne pas se laisser atteindre par ce qui ce qu’il y a autour de murmures ou de notes de musique, de bruits de klaxons ou de ceux de verres qui se heurtent, de cris d’enfants ou de conversations bruyantes.

Il y a aussi parfois ce regard qui ne regarde pas, juste les yeux qui quittent la feuille ou le carnet, le temps de retrouver le mot, l’expression et parfois le trouble quand celui qui écrivait remarque notre présence.

Et je me suis toujours demandée quel quotidien est celui de qui partage la vie de quelqu’un qui écrivait. Est-ce qu’on le regarde comme on regarde ceux qui écrivent partout ou si on a un regard différent? Se lasse-t-on de voir l’écrivain peint par Olimpiada F. Sloyanova écrire ou est-ce un bonheur continu? Il me semble que pour moi la seconde option s’appliquerait.

Le devoir

scott_s

LE DEVOIR

Alex, fourbu, déguste sa tartine après avoir trimballé du salon à la cuisine les trois encyclopédies nécessaires à la réalisation de son devoir de géographie.

Les augustes livres lui ont permis d’atteindre l’étagère où se trouvait le beurre d’arachide.

(publié dans XYZ. La revue de la nouvelle, no.61, printemps 2000)

*sculpture de Scott Streadbeck

À moins que vous ne préfériez le blanc?

Filed under: Signé Lilas,Vos traces — Lali @ 8:04

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Les goûts et les couleurs ne se discutent pas. Et puis, quand le blanc est aussi beau, il est tout aussi tentant que le rose. Mais pour cela, il faut prendre rendez-vous avec Géraldine. Il y a de jolis coins à voir, m’a-t-elle glissé en douce en même temps que quelques photos à venir…

Vous prendrez bien un peu de rose?

Filed under: Vos traces — Lali @ 8:00

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Moi oui! Rendez-vous à Genève, il paraît qu’il se cache par là. Et il semblerait aussi que Denise sait exactement où. Nous n’aurons qu’à la suivre. Qui vient?

Une semaine de quatre dimanches?

Filed under: Couleurs et textures — Lali @ 7:33

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C’est chaque lundi la même pensée qui traverse son esprit. Pas intéressant du tout la semaine des quatre jeudis. Mais la semaine des quatre dimanches? Alors là, oui! La lectrice d’Hélène Beck serait partante. Elle n’aurait pas à se dire qu’il lui faut bouger. Elle n’aurait pas eu à fermer son livre. Rien de cela. Une semaine de quatre dimanches… Et elle rêve. Je n’ose pas lui dire qu’on est lundi et qu’il serait temps qu’elle se précipite sous la douche. Rêver est si bon.

30 mars 2008

Extraits quotidiens 3

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:58

beth_k

Il n’est pas encore minuit. Et la lectrice de Beth Kappa a à nouveau ouvert le numéro de la revue Estuaire. Il n’a qu’à fermer les yeux et à se laisser porter les mots, par les images. Pour un troisième soir.

Des plaques de glace
S’accrochent aux arbres
La terre retient sa sève
Ce n’est pas encore
L’heure des bulbes éclatés
Le froid cède peu à peu
Sous la poussée de la lumière
Alors le fleuve se met
En dérive
Sur les berges verdies
Et le soleil qui descend

Les îles m’étreignent
Dans leurs alliances

(Louise Cotnoir)

Un livre qu’elle offrira souvent

Filed under: Couleurs et textures — Lali @ 22:44

david_s

Ça ne lui était pas arrivé depuis longtemps. Des années, semble-t-il. Aimer un livre à un point tel qu’il donne envie de l’offrir à tous ceux qu’on connaît. Et le cœur de la lectrice de David Schock se gonfle de bonheur à l’idée que le livre ira chez l’un et chez l’autre, qu’il fera le tour, qu’il procurera des moments de bonheur à ceux qu’elle aime.

Et j’ai cherché dans mes souvenirs quels livres j’avais offerts plus d’une fois. Il y en a bien quelques-uns. Mais il y a aussi tous ceux que, du temps de ma vie de libraire, je conseillais inlassablement. Et mes souvenirs se mélangent. Ils me parlent de Nelligan, de Jacques Sternberg, de François Gravel, de Louise Dupré, et je ne sais plus quel livre j’ai offert le plus souvent.

Mais vous, dites-moi, y a-t-il un livre que vous ayez souvent offert?

Tremblante

Filed under: Couleurs et textures — Lali @ 22:04

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Il y avait parfois des livres sur la table. Rarement. Et quand il y en avait, ceux-ci ne ne tournaient qu’autour d’un seul sujet qui la laissait froide, à savoir OVNI et tutti quanti. Quand bien même il avait mis une lampe pour les aviser qu’il était là, prêt à partir dans une quelconque soucoupe, elle faisait comme si rien de cela n’existait. Comme si cette folie qui avait gagné son cerveau à force de rouge, de broue ou de fumée, ne la concernait plus.

Elle n’avait pas été en mesure de calmer les démons qu’il entretenait. Et qu’il noyait soir après soir jusqu’à s’endormir sur la table tandis qu’elle s’emparait de la manette de la télévision pour éteindre l’engin. L’engin infernal qu’elle avait fini par détester dans un premier temps parce qu’elle aurait voulu parler, le sortir de son mal de vivre. Et qu’elle avait fini par aimer parce qu’elle n’avait plus à parler. On ne peut sortir quiconque de l’enlisement que s’il ne le veut lui-même.

Elle avait connu les urgences psychiatriques des hôpitaux. Elle l’avait entendu mentir à ceux qui tentaient de l’aider. Comme il lui mentait à elle. Comme il se mentait à lui avant tout.

Et elle culpabilisait. Parce qu’elle était impuissante. Parce qu’elle n’avait plus la force de le sauver. Parce qu’elle ne l’aimait plus et qu’elle n’était pas sûre d’avoir aimé l’homme. Elle culpabilisait. Elle s’était sentie responsable de lui à partir du jour où il avait dit qu’il l’aimait. Elle culpabilisait parc que des phrases de Saint-Exépury lui revenaient à l’esprit.

Et puis, elle se croyait forte. Et elle l’a été. Jusqu’à l’épuisement. Jusqu’à être sérieusement malade d’une maladie qui ne le concernait pas. Seul lui comptait. Et elle avait fini par croire qu’elle était une petite chose insignifiante, par croire qu’il avait pitié d’elle pour ne pas partir.

Les manipulateurs ont toujours les mots pour mettre leur victime à leur merci. Et si en plus la victime, sous le poids de chaque remarque insidieusement glissée au fil des semaines, des mois, des ans, finit par croire qu’elle n’est rien, le manipulateur aura beau jeu et pourra continuer sa démolition en règle. La victime n’aura plus la force de se défendre.

Et il y avait ce silence autour d’elle. Ce lourd silence. On compatissait, mais personne n’osait la sortir de sa torpeur. Elle était ruinée physiquement et mentalement. Mais personne ne savait à quel point.

Or, dans sa nuit noire, une main amie s’est tendue, inespérée. Et il n’y a plus eu d’homme endormi sur sa table. Le personnage peint par Warren Criswell était sorti du tableau.

Elle a ouvert les stores, a écouté ce qu’elle aimait et non plus Pink Floyd ad nauseam, qu’il avait fini par lui faire détester. Elle a à nouveau mangé des fruits de mer, du poisson, du foie de veau, des fromages qui puent, toutes ces choses qu’elle aimait et qu’elle avait dû mettre de côté. Et elle a déplacé tous les meubles. Donné toutes les photos à sa fille à lui.

Et la plupart du temps, elle ne se souvient pas de ces neuf ans d’une vie où elle a été la Mère Teresa d’un homme qui sombrait chaque jour davantage dans la folie et dans tout ce qui l’aggravait. Et s’il n’y avait pas eu cette vieille connaissance à lui, croisée par hasard, à qui elle n’a rien à dire et qui s’est empressée de demander si elle avait des nouvelles alors qu’elle n’en veut surtout pas, elle n’aurait pas tourné la clé dans la serrure, tremblante. Les fantômes ont parfois la vie dure. Surtout si on les sollicite. Mais il n’y avait ni Pink Floyd ni odeur de fond de barrique dans l’air.

Captivé

Filed under: Couleurs et textures — Lali @ 21:05

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Toute la journée, elle le suit des yeux. Où qu’il aille, le petit lecteur peint par Victoria Ekelund traîne un livre avec lui. L’un ne va pas sans l’autre. Depuis toujours. Depuis ce premier livre en tissu qu’on lui a offert alorsd qu’il n’avait que quelques mois. Aucun ours en peluche, aucune voiture, rien ne le captive longtemps. Sauf les livres. Qu’il ne veut pas quitter même à l’heure du sommeil. Si bien que soir après soir la maman ferme le livre et éteint la lampe de l’enfant endormi. Heureux.

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