Trop tentant
C’était trop tentant. J’ai dû sortir mon appareil pour tenter de capter l’ombre des branches sur les feuilles colorées dans la lumière de la fin de l’après-midi. Trop tentant, vous dis-je.
C’était trop tentant. J’ai dû sortir mon appareil pour tenter de capter l’ombre des branches sur les feuilles colorées dans la lumière de la fin de l’après-midi. Trop tentant, vous dis-je.
Ça prenait bien Armando pour me faire découvrir, à partir de Bruxelles, une artiste de jazz canadienne. Et pas n’importe laquelle, puisqu’à l’émission Canada Now de CBC, on a dit d’Emilie-Claire Barlow qu’elle était The next big thing in jazz. Son album The Very Thought Of You en est la preuve. Il y a chez cette Ontarienne de naissance un je-ne-sais-quoi d’irrésistible, particulièrement quand elle chante en français les titres Les yeux ouverts et C’est si bon, lesquels donnent une irrésistible envie de sourire. Reste à voir maintenant s’il reste des billets pour sa performance montréalaise du 30 novembre!
Une vie sans chocolat est une vie à laquelle manque l’essentiel.
[Marcia Colman et Frederic Morton]
Heureusement, l’essentiel est là ces jours-ci. Quelqu’un a vu à m’approvisionner en délices délicieusement délectables. Que je déguste avec parcimonie et bonheur. Quelqu’un qui sait, de plus, ma prédilection pour le chocolat belge et ma gourmandise. Bonne idée que la maison Neuhaus ait pignon sur rue en face du Musée des beaux-arts.
L’amour, ça doit se lire tout de suite. Ce n’est pas une partie de cache-cache.[ Bernard Giraudeau ]
« Je trouve que Giraudeau a vachement raison.
-Ah bon?
-Si. Ça ne prend pas des semaines ou des années pour savoir quel sentiment on éprouve pour quelqu’un.
-Donc?
-Donc, on sait assez vite, Nathalie. Je te le dis.
-Donc?
-Donc, ton Julien sait très bien ce qu’il ressent à ton égard. La seule chose qu’il ne sait pas, c’est s’il doit de te l’avouer…
-Tu crois?
-Oui, miss, je crois.
-Vraiment?
-Oui, vraiment. D’ailleurs, lis là…
Et cela dure depuis des heures entre les deux amies peintes par Abraham Leon Kroll. Deux amies en train de décortiquer les mots d’un certain Julien, obtus, hésitants. L’une prise d’assaut par l’autre dès son arrivée, si bien qu’elle en a oublié d’enlever manteau et chapeau.
Il me semble avoir vécu cette scène il y a des années. Comment s’appelait-il donc celui qu’aimait Nancy ou une autre?
Certains penseraient à la regarder qu’elle est triste, le visage ainsi appuyé dans la main. Et si jamais ils ne la trouvaient pas triste, ils diraient : résignée. Et pourtant, je ne vois pas telle la lectrice d’Alfredo Zalce. Songeuse, perdue dans ses rêves. Mais ni triste ni résignée. Parce que je n’ai pas envie qu’elle le soit? Peut-être. Parce que je n’ai pas envie d’être triste? Peut-être aussi.
En tout cas, pas aujourd’hui. Pas aujourd’hui, où la lumière est belle, où les idées fourmillent à la vitesse grand V, où je me fais une petite pause devant un café à la vanille. Pas aujourd’hui, alors qu’une collègue vient de m’annoncer les yeux brillants et le sourire jusque là qu’elle est amoureuse. Pas aujourd’hui, alors que la musique et les livres m’attendent. Comme autant d’amis qui s’ajoutent à ceux qui s’attardent au pays de Lali.
Comme ils sont doux ces moments où elle écrit, où elle laisse aller sa plume sans retenue. Comme ils sont doux ces moments de complicité entre les mots et elle. Ces mots qu’il lira. Parce qu’il la lit toujours. Mieux qu’un autre.
Comme ils sont doux ces moments où l’écrivaine de Jean-Pierre Mancardi sait qu’elle n’écrit pas en vain et qu’un destinataire saura reconnaître même ce qu’elle ne dit pas.
Ce qu’ils sont doux ces moments entre elle et elle, où le je se dessine parfois, tandis qu’elle parle d’un arbre ou d’une chanson.
Comme ils sont doux ces moments où la vie s’arrête le temps de phrases sur le papier.
Je l’ai appelé l’arbre du matin, parce que matin après matin, à quelques pas de l’arrêt du second autobus que je prends pour aller au travail, il est là, chaque jour différent. Parfois plus jaune, parfois plus rouge, certains matins d’un orange flamboyant. Et je le regarde. Hier, j’étais en avance. Il y aura donc quelques photos de l’arbre du matin. Parce qu’entre nous un petit quelque chose de différent. Pourquoi lui et pas un autre?
C’est là une question de l’existence. Pourquoi lui et pas un autre? Tenter d’y répondre, c’est déjà moins aimer.