Les poèmes de Rina Lasnier 3
Sait-on avant d’ouvrir un livre ce qu’il fera bouger en soi? Sait-on toute l’émotion qui nous gagnera au fur et à mesure que les mots prendront toute la place? Sait-on tout cela? Savait-elle tout cela, la lectrice de Jules Pascin, quand elle a ouvert le recueil de Rina Lasnier? Savait-elle qu’elle s’arrêtait là, précisément là, sur ce poème?
Beauté
Laisse le nénuphar au lac, laisse le poète à sa solitude;
le nénuphar n’a pas dédaigné le pré ou le jardin, le poète n’a pas choisi de chanter;
même s’ils baignent dans l’eau pure de la beauté, ils restent mêlés à la boue de la terre par leurs racines.
Une goutte d’eau… quand on a soif du lac entier… un poème… quand on poursuit la beauté absolue…
Laisse le nénuphar à la coupe changeante du lac, laisse le poète à la coupe sans bords du rêve…