Lali

11 janvier 2013

Les vers de Wislawa 1

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

Coup de foudre

Ils sont convaincus, tous les deux,
qu’un sentiment soudain les a réunis.
Belle est cette certitude
mais plus belle encore l’incertitude.

Certains que, puisqu’ils ne se connaissent pas,
entre eux rien ne s’était jamais passé.
Et qu’en pensent les rues, escaliers et couloirs
où depuis des lustres ils pouvaient se croiser?

J’aimerais leur demander
s’ils ne se souviennent pas —
peut-être, dans ce tourniquet,
autrefois, face à face?
quelque « pardon » dans la cohue?
un « c’est une erreur » au téléphone?
Mais je connais par avance la réponse.
Non, ils ne s’en souviennent pas.

Ils seraient fort étonnés d’apprendre
que, depuis un bon moment
le hasard jouait avec eux.

Sans être tout à fait prêt
à se faire destin pour eux,
il les rapprochait et les éloignait,
il les croisait en chemin
pour s.écarter aussitôt
en riant sous cape.

Il y eut des signes, des indices,
illisibles, mais quelle importance.

Qui sait, peut-être il y a trois ans,
sinon mardi dernier,
une feuille avait volé
d’une épaule l’autre?
Quelque chose de perdu et de ramassé?
Peut-être ce ballon, déjà,
dans les aubépines de l’enfance.

Il y eut verrous et sonnettes
où, bien avant l’heure dite,
un toucher se couchait sur un autre toucher?
Des valises, côte à côte, à la consigne?
Un rêve identique, une nuit,
aussitôt effacé le matin?

En fait, tout début n’est jamais qu’une suite,
et le livre des événements
à jamais ouvert au milieu.

Wislawa Swymborska, Je ne sais quelles gens

*choix de la lectrice d’Albert Bartholomé

Béniwi

Filed under: À livres ouverts,Pour petites mains — Lali @ 19:21

Certains livres sont de vrais moments de bonheur. Tel est le cas de Béniwi ou l’enfant sans nom, un album signé Claire Clément qui met en scène Béniwi, Bénimi qui signifie « Fiston », mais qui est le seul prénom que le jeune garçon a toujours eu, ce qui attire la moquerie le jour où il se met à fréquenter d’autres enfants.

Bénimwi ayant toujours vécu dans un coin reculé du Burundi avec pour seul compagnon son grand-père ne connaissait rien de la méchanceté des enfants. Sa vie avait toujours été sans surprise et faite de bonheurs simples. Mais il a six ans et il est temps pour lui de quitter ce coin perdu et d’aller rejoindre ceux qui sont partis depuis longtemps.

La raison de cet isolement ne nous est pas donnée. On peut facilement imaginer une guerre, une épidémie, une catastrophe naturelle, lesquelles constituent toutes de bonnes raisons d’expliquer la situation dans laquelle il se trouve, mais on ne saura pas pourquoi Béniwi ne semble jamais avoir eu de contacts avec d’autres humains que son grand-père. Ce qu’on apprendra, c’est qu’il est donné à chacun de se faire un nom, peu importe celui qui nous a été donné, et de le rendre inoubliable, car chacun est unique. Qu’on s’appelle Béniwi ou autrement.

J’ai eu un véritable coup de cœur pour cet album. À dire vrai, un énorme coup de cœur. J’ai aimé Béniwi ou l’enfant sans nom pour sa simplicité. Pour la douceur qui s’en dégage. Et pour son dénouement inattendu. N’hésitez pas à l’offrir. Un peu de rêve fait toujours du bien.

Ce que mots vous inspirent 837

Filed under: Ce que mots vous inspirent,Couleurs et textures — Lali @ 8:00

Dans la nuit intérieure où chacun est plongé
on peut voir s’agiter une aurore boréale.

(Michèle Lalonde)

*toile de Wilfredo Alicdan