Voix d’Argentine 1
Âme bienheureuse
L’après-midi touchait à sa fin, ce jour-là,
et j’allais pour te saluer comme à l’accoutumée,
quand une angoisse vague à te quitter
m’apprit que je t’aimais.
Ton âme, sans le comprendre, savait déjà…
Tu rougis, j’en fus en te parlant illuminé,
et, au moment de nous séparer, tu t’écartas
du groupe, encore tout intimidée.
Silence et frisson fut notre surprise;
mais déjà la plénitude de la promesse
nous comblait d’une joie si douce
que nos lèvres tout bas soupirèrent…
Et ton âme palpitait entre tes doigts
comme si elle allait s’effeuillant.
Leopoldo Lugones
(extrait de Poésie argentine du XXe siècle d’Horacio Salas)
*choix de la lectrice de Grace Cossington Smith