
Le village englouti de Rosa Lobato de Faria, publié en 1999, met en scène les personnages d’un village de l’Alentejo qui va être submergé au profit d’un barrage, histoire qui n’est pas sans rappeler celle de Luz, village englouti dont les habitants ont été déplacés dans un lieu voisin fait de nouvelles maisons modernes et sans âme.
Et c’est justement ce à quoi vont se trouver confrontés chacun des personnages de ce magnifique roman, la perte de leur identité, de leurs repères, de leur histoire, des légendes qui ont traversé les siècles et donné du caractère à ce village qu’ils ne se décident pas à quitter. Que ce soit Filomena, élevée en France, qui a décidé de vivre les derniers jours du village dans la maison de ses ancêtres. Que ce soit Sebastiana, 93 ans, qui connaît les histoires de tout le monde tout autant que les légendes qu’elle transmet à Filomena pour qu’elles se perpétuent quand elle ne sera plus là. Que ce soit Ivo, professeur à la retraite, qui embauche Filomena pour ordonner sa bibliothèque et dont il s’éprend. Ou les trois sœurs Branco, sorties tout droit de Tchekhov, unies par un secret et par un homme qui les a toutes possédées différemment. Ou encore Pedro, le fils d’une des Branco, qui est à lui seul un poème par ses rêves et sa soif d’apprendre.
Autour d’eux gravitent d’autres personnages qui attendent de nouvelles maisons et le dernier moment pour partir tandis que se jouent au quotidien des drames de grande ou de moindre importance au fil de l’eau, source de toutes les légendes, de vie comme de mort, et surtout de toutes les passions.
Un roman qui vous prend dès la première ligne et jusqu’au dénouement alors que des narrateurs viennent à tour de rôle raconter un peu d’eux et beaucoup de ce village qu’ils aiment et auquel ils tiennent. Le roman d’une femme qui savait raconter.