Moments choisis 6
C’est la lectrice du peintre hollandais Jacobus Vrel qui tourne ce soir les pages de Chouennes, le recueil de Pierre Perreault. Une écriture bien loin de celles qu’elle lit habituellement, presque déroutante. Mais qui l’a tout de même séduite.
Le temps qui reste
le feu est à son comble et un peu plus
de silence finirait par tuer la maison
très peu de temps nous restera
pour remonter à la source
chaque objet en nous se meurt
plus encore qu’il ne paraît vivre
à première vue et nous sommes déjà
éclatants de couleurs
j,ai mal jugé du pain, il faudra
autrement répartir mes pauvres paroles
très peu de temps nous restera
pour répondre à toutes les questions
nous chanterons hautement l’herbe
et les arbres et boirons à merveille
le cidre doux et la liqueur des fruits
de cette boisson de toute chair
nous emporterons le plus clair des rêves
au pays d’où le vent ne revient pas
tout m’arrivera de près sauf les souvenirs
les montagnes ne seront qu’à moitié
et le fleuve aussi long que large
dans toutes les directions du cœur
dès lors je resterai à la merci
des nomes de villages et des cloches
je n’ai pas une heure à perdre
et nous resterons à fleurir
de l’ultime façon
moins de temps qu’à passer
d’un bout à l’autre du cœur