Les vers de Sophia 29
C’est avec émotion et les mains tremblantes que la lectrice de Brenda Ginsberg a ouvert Malgré les ruines et la mort de Sophia de Mello Breyner. Elle attendait ce jour depuis des semaines. Et quand elle a eu parcouru ces vers, elle a su qu’elle avait attendu ces mots toute sa vie.
Carnet I
Quand je me plonge à nouveau dans cet ancien
Cahier à la couverture noire en toile cirée
Qu’un jour avec fureur je déchirai et qu’un ami
Feuille après feuille racommoda avec patience et lenteur
Tout me blesse encore comme une lame qui coupe
Car devant moi s’étalent – bruissement et forêt –
Les longues après-midi les nuits mélangées
Où je divague et incessamment divaguent
Les vénéneux parfums mortels de la jeunesse
Et la lumière me blesse comme un jardin perdu