En la nuit 1
Souvenirs
Immobile, pourtant
je suis si loin!
par le long cordon du voyage
qui me nourrit,
chemin de chaleur
allant du lac à la mer.
Miroitent ici les arbres en départ,
les hautes nappes de vert tendre.
Quand mon regard ainsi éveillé
se tend vers les signes,
vers la frange du Jura souabe,
le bleu de la Forêt-Noire,
la vigne d’Alsace :
les phalènes s’y brûlent.
N’ai-je été trop souvent
le convive des dieux?
L’adorant des lumières?
Tous ces souvenirs qui me portent,
enserrant un paysage,
qui m’aspirent comme un abîme
béant dans le temps!
J’étais ailleurs…
Fernand Ouellette, En la nuit, la mer
*choix de la lectrice d’Ellen Trotzig