En vos mots 230
À l’heure où septembre vient de nous ouvrir les bras, à l’heure où Montréal fait face à une nouvelle canicule après un des étés les plus chauds que la ville ait connus depuis longtemps, j’ai eu envie d’offrir au lecteur du jour un peu de la fraîcheur que seuls certains parcs semblent nous offrir si on veut tout de même profiter de la saison sans s’enfermer à l’air climatisé.
C’est donc le lecteur de l’artiste Gustave Caillebotte qui va nous tenir compagnie jusqu’à dimanche prochain, le temps que vous l’examiniez de près afin de nous raconter son histoire — ou la vôtre à travers lui — en vos mots.
Suite dans sept jours. D’ici là, bon dimanche et bonne semaine à tous les envosmotistes et à ceux et celles qui les lisent.
UN CHEMIN SANS HISTOIRE
Derrière son journal se cache la nostalgie
D’un long dimanche d’été;
Dessous son chapeau de paille une solitude remplie
D’une vie désenchantée.
Traîne l’indifférence d’une femme à la fontaine
Derrière son tablier.
Deux humains, sans amour et sans haine
Tranquilles et résignés.
Flairjoy
Comment by Flairjoy — 7 septembre 2011 @ 6:07
« Autour de ma maison
Pour vivre clair, ferme et juste,
Avec mon coeur, j’admire tout
Ce qui vibre, travaille et bout
Dans la tendresse humaine et sur la terre auguste.
L’hiver s’en va et voici mars et puis avril
Et puis le prime été, joyeux et puéril.
Sur la glycine en fleurs que la rosée humecte,
Rouges, verts, bleus, jaunes, bistres, vermeils,
Les mille insectes
Bougent et butinent dans le soleil.
Oh la merveille de leurs ailes qui brillent
Et leur corps fin comme une aiguille
Et leurs pattes et leurs antennes
Et leur toilette quotidienne
Sur un brin d’herbe ou de roseau !
Sont-ils précis, sont-ils agiles !
Leur corselet d’émail fragile
Est plus changeant que les courants de l’eau ;
Grâce à mes yeux qui les reflètent
Je les sens vivre et pénétrer en moi
Un peu ;
Oh leurs émeutes et leurs jeux
Et leurs amours et leurs émois
Et leur bataille, autour des grappes violettes !
Mon coeur les suit dans leur essor vers la clarté,
Brins de splendeur, miettes de beauté,
Parcelles d’or et poussière de vie !
J’écarte d’eux l’embûche inassouvie :
La glu, la boue et la poursuite des oiseaux
Pendant des jours entiers, je défends leurs travaux ;
Mon art s’éprend de leurs oeuvres parfaites ;
Je contemple les riens dont leur maison est faite
Leur geste utile et net, leur vol chercheur et sûr,
Leur voyage dans la lumière ample et sans voile
Et quand ils sont perdus quelque part, dans l’azur,
Je crois qu’ils sont partis se mêler aux étoiles.
Mais voici l’ombre et le soleil sur le jardin
Et des guêpes vibrant là-bas, dans la lumière ;
Voici les longs et clairs et sinueux chemins
Bordés de lourds pavots et de roses trémières ;
Aujourd’hui même, à l’heure où l’été blond s’épand
Sur les gazons lustrés et les collines fauves,
Chaque pétale est comme une paupière mauve
Que la clarté pénètre et réchauffe en tremblant.
Les moins fiers des pistils, les plus humbles des feuilles
Sont d’un dessin si pur, si ferme et si nerveux
Qu’en eux
Tout se précipite et tout accueille
L’hommage clair et amoureux des yeux.
L’heure des juillets roux s’est à son tour enfuie,
Et maintenant
Voici le soleil calme avec la douce pluie
Qui, mollement,
Sans lacérer les fleurs admirables, les touchent ;
Comme eux, sans les cueillir, approchons-en nos bouches
Et que notre coeur croie, en baisant leur beauté
Faite de tant de joie et de tant de mystère,
Baiser, avec ferveur, délice et volupté,
Les lèvres mêmes de la terre.
Les insectes, les fleurs, les feuilles, les rameaux
Tressent leur vie enveloppante et minuscule
Dans mon village, autour des prés et des closeaux.
Ma petite maison est prise en leurs réseaux.
Souvent, l’après-midi, avant le crépuscule,
De fenêtre en fenêtre, au long du pignon droit,
Ils s’agitent et bruissent jusqu’à mon toit ;
Souvent aussi, quand l’astre aux Occidents recule,
J’entends si fort leur fièvre et leur émoi
Que je me sens vivre, avec mon coeur,
Comme au centre de leur ardeur.
Alors les tendres fleurs et les insectes frêles
M’enveloppent comme un million d’ailes
Faites de vent, de pluie et de clarté.
Ma maison semble un nid doucement convoité
Par tout ce qui remue et vit dans la lumière.
J’admire immensément la nature plénière
Depuis l’arbuste nain jusqu’au géant soleil
Un pétale, un pistil, un grain de blé vermeil
Est pris, avec respect, entre mes doigts qui l’aiment ;
Je ne distingue plus le monde de moi-même,
Je suis l’ample feuillage et les rameaux flottants,
Je suis le sol dont je foule les cailloux pâles
Et l’herbe des fossés où soudain je m’affale
Ivre et fervent, hagard, heureux et sanglotant. »
Emile Verhaeren
Comment by Denise — 8 septembre 2011 @ 5:04
Des mots comme des feuilles d’automne
De mon cœur se sont envolés
L’encre des souvenirs m’empoisonne
Plus de vous dans mon encrier
Et je m’offrirai des mots nouveaux
À l’encre nouvelle de l’espoir
Et j’habillerai mes quelques mots
De la lumière tendre d’un soir
À l’heure où le ciel rougit encore
Et où la lune lui ouvre les bras
Puisque l’amour est plus fort
Et que la vie c’est comme ça
Je partirai vers d’autres visages
Il y a tant des gens à aimer
Il y a encore tant de pages
Des mots qui rêvent de s’envoler
Libres comme des oiseaux
Qui s’envolent vers la vie
Comme des jeunes fougueux
Et puis un arbre pour faire un nid
Vous viendrez longtemps m’épier
C’est là votre seule gloire
C’est votre moyen d’exister
De bon matin jusqu’au soir
Et je vous laisse mes mots usés
Qui vous donnent tant de joie
Visages et prénoms oubliés
Puisque la vie c’est comme ça
Et les arbres encore dénudés
Attendront impatiemment
Que je remplisse mon encrier
Avec les mots du printemps
Comment by Armando — 11 septembre 2011 @ 6:34
L’ÉPOQUE OÙ J’ÉTAIS BELLE
Tu faisais semblant de ne pas me voir quand je passais,
Et je faisais semblant de ne pas voir que tu me voyais.
La robe à rayures était la seule que je possédais,
De loin, tu ne pouvais pas voir son pan effiloché.
Plus tard, tu me dirais que c’était l’éclat de mon teint,
Ma fraîcheur qui t’appelait comme une sirène au matin.
Plus tard, je te dirais que c’était mon regard solennel
Qui a fait que tu m’aimes à l’époque où j’étais belle.
Les époques s’effilochent comme les pans, comme les teints,
Et l’amour aussi, et la vie, et les rêves, tous éteints.
Les teints, les sirènes, la fraîcheur, les regards
Ne durent qu’un moment, et puis, on est vieillards,
Mais un peintre l’a immortalisée, irréelle,
Cette rencontre de l’époque, où oui, j’étais belle.
Comment by joye — 11 septembre 2011 @ 9:42
Adélaïde lit le chapitre Lettre III du petit livre (tout petit) que lui a confié sa grand-mère :
“Conseils d’une Mère à ses Filles” de Mme PERMOND. Livre de 1911 et qui a l’assentiment de l’Eglise.
“De la réserve que doit garder une femme.”
“Dès le début de ces instructions, je vous disais, mes chères enfants, que la réserve doit être une des premières qualités de la jeune fille. Celle d’une jeune femme ne doit pas être moindre. La retenue doit être presque la même ; je crois volontiers qu’on pardonne plus facilement à une jeune fille une action, une parole imprudente, en disant qu’elle ne comprend pas la portée, qu’à une jeune femme qui doit se rendre compte de l’importance de ses actions et des ses paroles. De plus, une jeune femme, ne devant plus chercher à plaire qu’à son mari, doit apporter une grande réserve dans ses conversations avec les jeunes gens. Son mari l’en aimera, et l’en estimera davantage.
Un jeune homme, en se mariant, veut sa femme pour lui tout seul, et, certes, il a raison. Rien ne paraît plus révoltant que ces jeunes femmes aimables et agaçantes avec les jeunes gens dans les réunions mondaines, et qui ont l’air de n’accorder aucune attention à leur maris. Si elles entendaient comme on les juge, elles seraient bien désillusionnées. On aime s’amuser avec elles ; c’est drôle de flirter avec les femmes des autres ; mais ces mêmes hommes qui les entourent et les flattent ne les voudraient pas pour compagnes de leur vie ; et si le mari, par amour-propre ou par dignité, n’ose pas montrer sa souffrance, ou faire une scène de jalousie, ses sentiments d’affection et d’estime pour sa femme n’en reçoivent une rude atteinte.
…”
Edifiant, non que l’éducation d’alors des jeunes filles ?
Education, à laquelle, on a heureusement échappée ! OUF !
Comment by LOU — 11 septembre 2011 @ 15:08