En vos mots 519
C’est grâce à une carte postale envoyée de Bruxelles que j’ai découvert l’illustrateur néerlandais Charles Burki. Et comme cette scène des plus livresques m’a beaucoup plu, j’ai décidé de vous la proposer afin que vous la fassiez vivre en vos mots.
Choisirez-vous d’écrire une courte nouvelle et de vous en exprimer en vers? C’est ce que nous saurons dans sept jours exactement, car aucun texte ne sera validé avant.
D’ici là, bon dimanche et bonne semaine à tous!

Ils collectionnaient les mêmes livres.
Point de surprise, quand l’un des deux montrait
A l’autre ses dernières acquisitions.
Mais toujours il faisaient semblant
De s’émerveiller.
Pour rien au monde ils n’auraient voulu blesser
Leur ami de toujours, presque leur frère.
Même si les tourmentait parfois
Une ombre de jalousie.
Quoi, l’autre avait trouvé le premier
Ces volumes tant convoités!
Il aurait fallu s’en douter.
Celui qui ne les avait pas encore
Comptait en faire l’achat sans tarder.
Ils avaient les mêmes goûts,
C’est ce qui depuis l’enfance
Les unissait.
Ils partageaient les mêmes magazines, mêmes illustrés,
Mêmes romans pour enfants, mêmes bandes dessinées.
Aujourd’hui ils se procuraient les derniers ouvrages
Qui faisaient autorité
En science, en philosophie, en histoire.
Ils chinaient, en général chacun de leur côté,
Afin de trouver des raretés anciennes.
Ils frémissaient de concert
Devant quelque trouvaille sensationnelle.
Ils aimaient pour se divertir
Lire aussi quelques bons policiers.
Enfin, il n’étaient que deux points
Sur lesquels divergeaient leurs inclinations.
L’un de ces désaccords garantissait d’ailleurs
Entre eux l’absence absolue
De rancoeur, ou de rancune.
En matière de femmes comme de bières,
Il n’y avait rien à faire.
L’un préférait les blondes.
L’autre les brunes.
Commentaire by Anémone — 19 mars 2017 @ 11:00
Collectionneur acharné de livres, Jean me parlait avec connaissance et fierté de tous ces livres ignorés qui étaient devenus, au fil des décennies, des films mythiques.
Les gens font abstraction du fait que les films sont d’abord des histoires qui naissent dans le cœur d’un écrivain. Dans le silence d’une imagination fertile métamorphosée dans un flots de mots drôles ou émotifs.
Tout le monde connaît Charlton Heston et Ben-Hur, mais peu savent que le roman est né de la plume de Lewis Wallace. De même que beaucoup peuvent tergiverser des heures sur l’issue de Fenêtre sur cour tout en parlant de l’excellent rôle de James Stewart, mais bien peu peuvent vous dire qui a été William Irish qui n’était autre que Cornell Woolrich.
L’émerveillement des mots de Jean me laissait à chacune de nos rencontres plus riche de connaissances et d’esprit. Cependant, j’avoue que j’éprouvais une énorme fierté d’être l’ami d’un homme qui avait conservé, au milieu de tous ses livres prestigieux, un live dont il ne parlait jamais et qui était à l’origine de tout. Celui qu’on aurait pu prendre pour le titre d’un film, Rémi et Colette, et grâce auquel il avait appris à lire.
Sans lequel rien n’aurait été possible. Même pas nos entretiens.
Commentaire by Armando — 26 mars 2017 @ 4:16