Sonnets portugais 1
J’ai eu envie de relire Elizabeth Barrett Browning, dont les poèmes m’avaient bouleversée quand j’avais quinze ans. J’entends encore Monsieur Chalvardjian qui savait raconter la vie des poètes comme pas un (et aussi sa fuite d’Arménie en passant par la Turquie) nous faire part de l’histoire d’amour qui avait uni Robert Browning et Elizabeth Barrett Browning. Elle, déjà écrivaine reconnue à qui un jeune écrivain écrit. Des lettres d’un admirateur, des lettres qui deviendront celles d’un amoureux, non pas timide, mais passionné.
Toute la durée de la correspondance entre les écrivains jusqu’à leur mariage (clandestin), Elizabeth écrivait en parallèle ce qui sera réuni sous le titre de Sonnets portugais. Des sonnets qui n’ont de portugais que l’âme – celle qu’on retrouve entre autres dans Lettres de la religieuse portugaise. Ou alors parce qu’on surnommait Elizabeth « la Portugaise » à cause de son teint mat.
Voici donc notre premier rendez-vous avec les Sonnets portugais. Un premier rendez-vous qui a réuni la lectrice peinte par Max Fleischer et ce sonnet :
Si pour toi je quitte tout, en échange
Seras-tu pour moi? N’aurais-je point
Regret du baiser que chacun reçoit
À son tour, et ne trouverais-je étrange,
Levant la tête, de voir de nouveaux murs?
Comment… une autre maison que celle-ci?
Combleras-tu cette place auprès de moi
Pleine de trop tendres yeux pour changer?
C’est le plus dur. Si vaincre l’amour est
Éprouvant, vaincre la peine plus afflige;
Car la peine est amour et peine aussi.
Las, j’ai souffert et suis rude à aimer.
Mais aime-moi – veux-tu? Ouvre ton cœur,
Et drape en lui les ailes de ta colombe.