
Les gens se laissent toujours tenter par les liste de meilleurs vendeurs. Va savoir pourquoi. À moins que ça ne les sécurise. Si un livre se vend, c’est qu’il est nécessairement bon, non? Et pourtant…
Je me rappelle d’un client qui tenait à tout prix à acheter LE livre qui tenait la première place de cette foutue liste. Pour l’offrir à une amie à l’hôpital. Pas parce qu’il savait de quoi le livre parlait. Pas parce qu’il connaissait l’auteur. Pas parce que l’écriture était remarquable. Pas à cause du thème. Non. Parce que c’était le meilleur vendeur du moment. Et quand il m’a demandé ce que je pensais de son choix, j’ai été un peu brusque, je l’avoue.
-Votre amie vous a couché sur son testament? ai-je demandé.
-… Euh… pardon? a fait le client en bredouillant.
-C’est que, voyez-vous, avec un livre comme ça, déprimant comme nul autre, vous allez l’achever. Mais si vous voulez hériter, c’est le choix parfait.
Plus jamais ce client n’a acheté un livre sans me demander conseil. Il m’a même un jour emmené cette amie sortie de l’hôpital : elle tenait à rencontrer la rigolote qui n’avait pas la langue dans sa poche et qui avait choisi pour elle un livre qui l’avait fait sourire de la première à la dernière page. Comme quoi!
*aquarelle de David Beschi