Lali

24 août 2015

Les vers d’Albert 9

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KUHFELD (Peter) - 8

Intimité

En attendant le jour où vous viendrez à moi,
Les regards pleins d’amour, de pudeur et de foi,
Je rêve à tous les mots futurs de votre bouche,
Qui sembleront un air de musique qui touche
Et dont je goûterai le charme à vos genoux…
Et ce rêve m’est cher comme un baiser de vous!
Votre beauté saura m’être indulgente et bonne,
Et vos lèvres auront le goût des fruits d’automne!
Par les longs soirs d’hiver, sous la lampe qui luit,
Douce, vous resterez près de moi, sans ennui,
Tandis que feuilletant les pages d’un vieux livre,
Dans les poètes morts je m’écouterai vivre;
Ou que, songeant depuis des heures, revenu
D’un voyage lointain en pays inconnu,
Heureux, j’apercevrai, sereine et chaste ivresse,
À mon côté veillant, la fidèle tendresse!
Et notre amour sera comme un beau jour de mai,
Calme, plein de soleil, joyeux et parfumé!

Et nous vivrons ainsi , dans une paix profonde,
Isolés du vain bruit dont s’étourdit le monde,
Seuls comme deux amants qui n’ont besoin entre eux
Que de se regarder, pour s’aimer, dans les yeux!

Albert Lozeau, Intimité et autres poèmes

*choix de la lectrice de Peter Kuhfeld

23 août 2015

Les vers d’Albert 8

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LADRAK (Nicole) - 7

L’attente

Mon cœur est maintenant ouvert comme une porte.
Il vous attend, ma Bien-Aimée : y viendrez-vous?
Que vous veniez aujourd’hui ou demain, peu m’importe!
Le jour, lointain ou proche, en sera-t-il moins doux?

Ce n’est point un vain mal que celui de l’attente;
Il conserve nouveau le plus ancien désir.
L’inattendu bonheur dont la venue enchante
Passe; à peine en a-t-on su goûter le plaisir.

Et l’on s’en va criant l’inanité des choses,
Pour ne s’être jamais aux choses préparé;
Insensé, qui repousse un frais bouquet de roses,
Accusant le parfum qu’il n’a pas respiré.

Une heure seulement de pure jouissance,
Pourvu que Dieu m’accorde un quart de siècle entier
De rêve intérieur et de jeune espérance,
Pour méditer sur elle et pour l’étudier,

Pour ordonner l’instant suprême qui décide,
Pour que rien ne se perde et que tout soit joui
Jusqu’à la moindre miette, et que le temps rapide
S’envole, n’emportant que de l’évanoui!

Une heure suffira. J’aurai vécu ma vie
Aussi pleine qu’un fleuve au large de son cours,
L’ayant d’une heure, mieux que de jours fous, emplie;
D’une heure, essence et fruit substantiel des jours!

Mon cœur est maintenant ouvert comme une porte.
Il vous attend, ma Bien-Aimée : y viendrez-vous?
Que vous veniez demain ou plus tard, il n’importe!
Mon attente d’amour fera de telle sorte

Que mon lointain bonheur en deviendra plus doux.

Albert Lozeau, Intimité et autres poèmes

*choix de la lectrice de Nicole Ladrak

22 août 2015

Les vers d’Albert 7

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LAFLEUR (Abel) - 2

Je l’aime

Je l’aime, comme on aime un beau vers de poète,
Qui chante clair comme un pinson,
Et que l’âme ravie avec ferveur répète, –
Pour la douceur de sa chanson.

Je l’aime, comme on aime une fleur fine et frêle
Qui paraît exquise à chacun,
Et qui charme encor plus lorsqu’on s’approche d’elle, –
Pour la douceur de son parfum.

Je l’aime, comme on aime une fleur, un vers tendre,
Comme une étoile au ciel d’été,
Comme tout ce qu’on aime aussi sans le comprendre, –
Pour la douceur de sa beauté!

Albert Lozeau, Intimité et autres poèmes

*choix de la lectrice d’Abel Lafleur

21 août 2015

Les vers d’Albert 6

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LAFON (Henri)

L’âme close

Nous avons commencé, lorsque nous nous aimions,
Par nous conter sans fin toutes nos actions,
Nos rêves les plus fous et nos moindres pensées;
Puis, ds choses se sont dans le vague effacées…
Sans jamais nous mentir, nous ne nous disions pas tout,
Nous ne nous contions plus nos désirs jusqu’au bout,
Et la prudente peut vint des choses écrites.
Nous nous sentions tout près, tout près d’être hypocrites.
Puis, nous prîmes parfois un air indifférent,
Comme un masque divers qu’on quitte et qu’on reprend.
Et depuis, sans savoir, comme on se laisse vivre,
Notre âme à peine tue est close comme un livre.

Albert Lozeau, Intimité et autres poèmes

*choix de la lectrice d’Henri Lafon

20 août 2015

Les vers d’Albert 5

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LEIBL (Wilhelm) - 7

Les mots d’amour

Les mots d’amour ne meurent pas,
Ils vivent au fond des mémoires
Comme les anciennes histoires
Qu’enfants, on nous contait, tout bas.

Ils sont les souvenirs des heures
Dont les regrets sont les moments;
Parfois, ils en sont les tourments
Et blessent les âmes meilleures.

Car plus d’une, au jour des aveux,
Prenant pour témoin l’hirondelle,
Jura qu’elle serait fidèle
Et ne ferait qu’une de deux.

Elles ont trahi! Pauvres âmes,
Leur amour, c’était l’amitié…
Mais les mots d’amour. sans pitié,
Les brûlent ainsi que des flammes!

Car – tristesse! – ils ne meurent pas,
Ils vivent au fond des mémoires
Comme les anciennes histoires
Qu’enfants, on nous contait, tout bas.

Albert Lozeau, Intimité et autres poèmes

*choix de la lectrice de Wilhelm Leibl

19 août 2015

Les vers d’Albert 4

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LEWIS (Wyndham) - 4

Douleur

Ce soir je me sens malheureux
C’est qu’il a menti le beau songe!
Je m’exaltais en plein mensonge
Ah! comme j’en sors douloureux!

Je croyais, et c’était ma gloire!
J’espérais, c’était mon bonheur!
Et maintenant, j’ai dans le cœur
Le mal affreux de ne plus croire!

Je pleure, et ma main tremble un peu…
Demain, je serai triste encore.
Je verrai sans plaisir l’aurore
Et sans plaisir l’infini bleu…

Quand on souffre par une femme,
Sans espoir d’être consolé,
On ne voit, d’un œil désolé.
Que le ciel sombre de son âme…

Albert Lozeau, Intimité et autres poèmes

*choix de la lectrice de Wyndham Lewis

18 août 2015

Les vers d’Albert 3

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LIEBERMANN (Ernst) - 2

La chanson des mots

Il est des mots qui sont des joies
Et d’autres qui sont des douleurs.
D’autres ont la douceur des soies,
D’autres ont l’arôme des fleurs.

Tous ont monté de l’âme aux lèvres,
Un soir triste, un matin joyeux;
Tous ont brûlé du feu des fièvres,
Ils ont lui tous au fond des yeux.

Tous ont fait vibrer d’autres êtres
De leur propre et sacré frisson;
Tous auront la gloire des maîtres,
S’ils ont fait naître une chanson,

Une chanson douce et câline,
Légère à la brise des soirs,
Une chanson grave et divine
Où sonnent d’immortels espoirs…

Il est des mots qui sont des joies
Et d’autres qui sont des douleurs,
D’autres ont la douleur des soires,
D’autres ont l’arôme des fleurs.

Albert Lozeau, Intimité et autres poèmes

*choix de la lectrice d’Ernst Liebermann

17 août 2015

Les vers d’Albert 2

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DOROKHIN (Andrei) - 1

Petite lettre

Sur le papier bleu pâle où je trace ces mots
Que demain vous lirez, attentive ou distraite,
Quelque chose de moi s’exprime et se reflète,
Comme un arbre penché sur le miroir des eaux.

Sans le vouloir, notre âme aux choses qu’elle touche
Laisse une empreinte neuve et claire comme un nom;
Les mots qu’elle choisit, s’ils ont le même son,
Changent de sens selon le regard et la bouche.

À parler de notre être, il s’en échappe un peu;
Rien qu’à frôler la main la rose la parfume;
Et, comme elle, mon cœur que vous transmet ma plume,
Plus subtil qu’un parfum, vit sur le papier bleu…

Albert Lozeau, Intimité et autres poèmes

*choix de la lectrice d’Andrei Dorokhin

16 août 2015

Les vers d’Albert 1

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MILLER (Patricia) - 1

Un air

Un air, auquel le vent du soir donne des ailes,
Un air de violon ou de violoncelle

Passe rapidement, triste et profond, sur nous,
Comme un oiseau perdu venant on ne sait d’où.

Il ralentit parfois son vol, puis l’accélère,
Descend, monte, s’élance, atteint la lune claire

Et redescend, plus faible à travers la rumeur,
Plane, remonte encore, et redescend, et meurt…

Qu’il ressemble à mon âme inégale et trop prompte,
Cet air de violon qui descend et qui monte!

Albert Lozeau, Intimité et autres poèmes

*choix de la lectrice de Patricia Miller

15 août 2015

Debout 4

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STEFFAN (Johann Gottfried)

Attente

L’œil glisse discret
su la pulpe fragile des semaines
pendant que l’hiver assoupi sous la neige retient
les larves d’amertumes
les amours sans pétales
et jusqu’aux écailles de l’esprit

guet muet du porteur de mots
plumet en veilleuse

Robert Giroux, Debout sur le côté des choses

*choix de la lectrice de John Gottfried Steffan

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