Souvent

Souvent, j’ai envie d’entrer dans un tableau, de prendre la place de la lectrice qui s’y trouve et d’y passer la journée. Aujourd’hui est une de ces journées. Je me laisserais volontiers porter par une histoire, j’oublierais l’heure, je ne lèverais la tête que pour regarder la mer et verser du thé dans ma tasse.
*tableau de Poul Friis Nybo
Mlle Lali, ne me prenez pas pour un insolent, mais je voudrais vous prévenir qu’une fois moi aussi j’ai levé ma tête pour regarder la mer et verser du thé dans ma tasse. Et vous savez quoi?… J’ai versé à côté. Pas loin, mais suffisamment pour inonder ma table d’un très bon thé venu du sud de l’Inde à dos de dromadaire et qui avait voyagé par la Mongolie, bordé la frontière entre la Russie et le Kazakhstan, pour descendre par la mer Caspienne jusqu’à la Turquie, puis la Grèce, l’Italie, la France, l’Espagne pour arriver enfin dans mon humble demeure, dans les environ de Lisbonne.
Donc, je regardais la mer en versant mon thé, et je me suis fait taper sur les doigts, parce que je n’ai pas regardé ma tasse lorsque je versais mon thé. Un détail. Un rien de rien. Une brindille. Qui a mis la maîtresse de maison en colère. « Tu ne fais jamais attention à rien », a-t-elle dit, comme si elle s’adressait à un enfant. Je suis resté traumatisé par tant d’autorité féminine.
Quand j’ai voulu argumenter que je faisais attention à la mer… et que la mer ce n’est pas rien quand même, elle m’a répondu : « Et tu te trouves drôle en plus? »
Ceci pour vous dire, regardez bien lorsque vous verserez votre thé. Apparemment regarder la mer et se verser du thé… eh oui… moi le thé c’est fini.
J’ai vendu le dromadaire et je suis tranquille. Je me suis mis à la bière. Que je bois au goulot.
Vous ne voulez pas plutôt regarder la mer en savourant une bière?… Fraîche, bien entendu.
Commentaire by Papi Tendresse — 23 mai 2025 @ 0:07