En vos mots 870


J’aime beaucoup les illustrations de l’artiste Virpi Pekkala. J’en ai d’ailleurs partagé quelques-unes avec vous au fil des ans. Or, en cette veille de Noël, pour l’avant-dernier En vos mots de l’année, ces lutins lecteurs m’ont semblé tout à fait appropriés.
À vous de les faire vivre, de nous raconter comment ils comptent se reposer maintenant que tous les cadeaux sont prêts à être livrés, ce qu’ils entendent lire au cours des prochaines semaines et ce qu’ils sont déjà en train de lire.
Aucun commentaire ne sera validé avant dimanche prochain, comme le veut l’habitude. Vous avez donc amplement le temps de lire les textes déposés sur la scène livresque de dimanche dernier et d’écrire quelques lignes d’ici là.
Bon réveillon et bonne semaine à tous les envosmotistes et à celles et ceux qui les lisent.
Cette histoire me vient de loin. De tellement loin que je ne pourrais plus vous dire à quel âge je l’ai vécue. Il me semble que le garçon s’appelait Frédo. Dans mes souvenirs il s’appelait Frédo. Comme le chanteur des Ogres de Barback.
Ceux qui avaient un peu de cœur le disaient débile. D’autres, méprisants, prétendaient qu’il était né déjà périmé. Moi je ne disais rien. Je le regardais. Toujours seul. Semblant indifférent aux moqueries. Traînant son bric-à-brac en toile grise, comme d’autres jalousent un trésor.
Pour Noël j’ai voulu lui offrir quelques cartes postales. Il a refusé. Me répondant que les cartes postales sont un moyen de correspondance. Il ne savait pas quoi faire. Il n’avait personne à qui écrire.
« Pourtant, lui ai-je dit, tu gardes des centaines d’illustrations inutiles et sans aucune valeur dans ton sac… »
Il me semble que, parfois, certains silences sont si longs que même les étoiles suspendent leur souffle. J’avoue m’être demandé si Frédo était resté sourd à ma remarque ou s’il ne l’avait pas comprise.
Puis, au bout d’un long silence, j’ai entendu sa voix presque effacée : « Si on m’avait appris à lire, je trainerais toujours des bouquins, alors les illustrations sont les seuls amis qui m’écoutent. Sans elles ma vie serait insupportable. »
Frédo a choisi de joindre un ailleurs sûrement moins douloureux, l’année suivante, un 23 décembre. À l’heure où on chante l’espérance et l’amour des autres.
Faut dire que j’ai connu des nuits longues. Certaines douloureuses. D’autres aussi froides qu’un chagrin.
Et ce sont de ces nuits-là, bercées par les voix lourdes des absents, que l’aube est témoin de mes larmes.
Commentaire by Armando — 26 décembre 2023 @ 0:18
Le soir, dans leurs cavernes, les lutins lisent. Vous ne le savez peut-être pas, mais ils lisent. Ils croquent des pommes, à longueur de soirées, et de journées aussi, qui ressemblent à des soirées car ils hibernent pour ainsi dire, durant plusieurs mois, dans leurs cavernes. Au cours de cette période, ils sortent très peu. Et vivent de leurs réserves. Pommes et lecture. Et chandelles aussi, sinon impossible de lire leurs chers bouquins.
Vous ne le savez peut-être pas non plus, mais les lutins vivent entourés de chats. A vrai dire, chaque lutin vit avec un chat, ou maximum deux. Car leurs grottes sont exiguës. Pas de place pour les grandes familles. Les chats aiment aussi les livres. Parce qu’ils aiment dormir en hauteur sur les piles de livres à lire.
Le soir, dans leurs cavernes, les lutins boivent beaucoup de thé. Ils aiment le thé. Presque autant que le pommes et les livres. Les chats ne boivent pas de thé. Ils dorment presque tout le temps, et qui dort dîne.
Dans les réserves des lutins, on trouve aussi quelques bonbons. Pour varier le menu. Les chats n’aiment pas les bonbons. Mais ils jouent avec leurs papillotes. Ainsi, tout le monde s’amuse dans la caverne en hiver. En attendant de sortir joyeusement, aux premiers rayons du printemps, pour s’occuper du jardin.
Commentaire by anémone — 29 décembre 2023 @ 13:35