En vos mots 180
À quoi peut bien rêver la lectrice peinte par l’artiste espagnol Ignacio Zuloaga, alors que le livre est resté ouvert? Au héros chevauchant les plaines de Russie? À moins que ce ne soit un gaucho argentin volant au secours d’une belle? Et si, plutôt que du héros, elle rêvait de ces pays qu’il traverse un à un?
À vous de nous livrer ce qui se cache derrière son regard, à vous de nous le dire en vos mots, comme certains le font semaine après semaine alors que d’autres le font ponctuellement. Pour le simple plaisir de donner vie à une toile.
Suite dans une semaine, alors que vous pourrez lire d’un coup tous les textes d’un coup, ou dès maintenant si vous avez envie de découvrir ce qu’a suscité la toile de la semaine dernière.

Pour tout vous dire je n’ai pas vraiment choisie d’être modèle. Un jour, je ne sais toujours pas par pied de nez du destin, une dame m’a abordée à la table du salon de thé en me disant qu’elle était peintre et qu’elle aimerait que je pose pour elle.
D’abord j’ai ri de bon cœur. Faut avouer que ce n’est pas commun qu’on vous aborde comme cela.
Nous avons discuté un peu. Puis, elle m’a laissé son numéro de téléphone et son nom, Ruth, en me demandant de réfléchir et puis de l’appeler si cela me disait de poser pour elle. On conviendrait à ce moment-là d’un prix.
J’avoue franchement que cette dame à la chevelure blanchie par le temps m’a paru un peu originale. Je lui ai répondu que j’y réfléchirais. Je lui ai souri poliment et puis je lui ai dit qu’on m’attendait. Que je ne pourrais pas rester plus longtemps. Et j’ai glissé ses coordonnées au fond de mon sac.
C’est qu’en passant devant la Galerie La toile inattendue que j’ai vu sa photo annonçant un vernissage prochain. Ruth dos Santos… Voilà un nom qui ne me disait rien de tout. Seul son visage marqué par les années et souriant me ramenait à cette voix qui quelques jours plutôt me demandant si je ne voulais pas poser pour elle.
-Pardon, Ruth dos Santos… la dame là, dans la photo… c’est qui?….
Il m’a semblé que le monsieur d’âge mûr est devenu aussi pâle qu’un cadavre.
-Comment ça, c’est qui?… Vous faites de l’esprit mademoiselle?…
-Non, pas du tout. Juste qu’elle ma proposé de lui servir de modèle il y a quelques jours…
-Ah, c’est vous, alors… La rencontre au salon de thé. Je vous imaginais plus grande.
-Pardon?… Elle vous a parlé de moi ?… Mais je ne lui ai même pas dit mon nom…
-Qu’importe votre nom, jeune fille… Vous avez pris une décision?…
-Mais je ne sais même pas qui elle est… Je découvre maintenant son nom et l’annonce du vernissage.
-Ruth dos Santos n’est autre qu’une des plus grandes peintres contemporaines, mademoiselle. Appréciée dans le monde entier et exposée dans toutes les grandes galeries d’art, de Londres à New York en passant par Paris, bien évidemment…
-Ça alors!… Et pourquoi moi comme modèle?… Elle peut avoir n’importe qui. De vrais modèles professionnels, qui sauront comment poser.
-Pourquoi vous?… Parce qu’elle vous a déjà peinte mademoiselle, elle vous attend juste pour achever son travail. Lui apporter un souffle d’âme comme elle dit.
-Vous me rendez confuse. Elle m’a déjà peinte dites-vous?…
-Oh que si mademoiselle. Depuis bien des années. Elle ne vous avait pas encore croisée.
-Ça alors. Vous êtes certain?… J’ai l’impression d’halluciner…
-Venez, je vous prie que je vous montre….
La pièce était ample et un peu désordonnée. Cela sentait la peinture et les produits. Pinceaux, spatules et tableaux inachevés étaient éparpillés un peu partout.
-Ne faites pas attention. Les peintres… Nous voilà… Regardez…
J’ai eu un léger vertige, tellement la ressemblance était hallucinante. J’en avais le souffle coupé. Comment avait-elle fait pour retenir mes traits rien qu’en me regardant quelques minutes dans un salon de thé, qui, de surcroit, ne baignait pas dans la lumière?
Je suis restée silencieuse. Les yeux collés à ce tableau inachevé, comme si une puissance étrange me ramenait à un rêve.
-C’est époustouflant… Comment elle a fait?…
Le monsieur, sans dire un mot, m’a tendu une photo vieillie par le temps. Une jeune femme était assise comme dans les contes des mille et une nuits. Une jeune femme aux cheveux longs qui me ressemblait tellement que j’avais du mal à le croire…
-Qui est-ce?… ai-je demandé.
Il a baissé la tête comme s’il cherchait les mots que je devais entendre. Puis il m’a regardée et d’une voix affaiblie par l’émotion m’a répondu : « Sa mère… qu’elle n’a jamais vraiment connue, puisque la dictature de Salazar l’a enfermée jusqu’à ce qu’elle oublie de vivre…
-Pourquoi ils ont fait ça?… Pourquoi?…
-Parce que les chemins qui nous conduisent à la liberté sont remplis de destins brisés.
Nous sommes restés pendant une longue période en silence. Un silence qu’on ne peut partager qu’avec des gens qui versent les mêmes larmes.
Et puis, pour tout vous dire je n’ai pas vraiment choisie d’être modèle. Un jour, je ne sais toujours pas par pied de nez du destin, une dame m’a abordée à la table du salon de thé…
Commentaire by Armando — 20 septembre 2010 @ 4:38
Pour peindre ce tableau Ignacio a demandé: En arrière plan un tas de nuages bleutés,
Des rideaux floraux avec des couleurs chaudes,
Un divan couvert d’un taffetas émeraude,
Un livret,un collier,une robe de soie,
Un châle de mousseline pour cacher l’avant-bras;
Et surtout, surtout, la clé de son succès:
Un modèle d’albâtre qui a du toupet!
Flairjoy
Commentaire by Flairjoy — 21 septembre 2010 @ 16:29
« DJANGO
Django
qui serais -tu
si tu n’étais pas Django
Django
l’étoile gitane
est venue te chercher
suivie d’un ange
portant ta guitare
pour jouer nuage
auprès de Sarah
Django Django
il pleut des notes de
sang sur la terre
et des milliers de
roseaux répètent
ton nom, Django. »
de Sandra Jayat
Commentaire by Denise — 25 septembre 2010 @ 15:13