Lali

10 août 2024

Les débutants

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 19:31

« … est-il donc si urgent, si pressant, si important de nouer un lien étincelant? » C’est un peu la question que se pose Anna, l’héroïne du roman d’Anne Serre, Les débutants. Un roman où il est question d’amour, de celui confortable comme un lit douillet dans lequel vit Anna depuis 20 ans avec Guillaume. Un roman où il est aussi question d’un coup de foudre, de celui que ressent Anna pour Laurent, et vice versa. Un roman qui fait le tour des émotions que cela suscite en elle, de l’état de trouble dans lequel elle se trouve à l’heure du choix de passer des bras de l’un à ceux de l’autre. « Une vie sans tristesse, est-ce une vraie vie? » C’est aussi ce que se demande Anna, chagrinée d’avoir peiné Guillaume et à l’idée de mettre fin à la stabilité pour quelque chose qui ne s’annonce pas aussi solide. Mais tout de même irrésistible, comme l’est souvent un nouvel amour.

Le roman d’Anne Serre est une sorte d’enquête sur le sentiment amoureux, une analyse que certains pourraient trouver fastidieuse tant elle est détaillée. Mais ce ne fut pas mon cas. Je me suis laissée emporter par les images, par les mots, par le rythme, et ce, jusqu’à la dernière page. Trouvant écho en moi à cette phrase : « Quelques semaines, quelques mois au pire, et un matin l’on se réveillera tout surpris de ne plus rien sentir, de ne plus aimer, et l’autre sera comme quelqu’un qui n’a jamais existé, on sera étonné d’avoir été lié par toutes les fibres de son être à cette image qui s’est dissoute. » Elle me semble si vraie.

5 août 2024

Un certain Paul Darrigrand

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 20:25

Je n’en avais pas fini avec Philippe Besson. Il a fallu que je me plonge dans le deuxième tome de ses trois romans autobiographiques sans tarder. Et je n’ai pas été déçue. En fait, je suis chaque fois séduite par la plume de cet écrivain, par sa façon bien à lui de nous livrer les émotions de ses personnages. Et c’est particulièrement bouleversant quand il parle de lui et de ce qui l’a uni à un certain Paul au début de la vingtaine, un homme marié. Une liaison qui lui fera se demander : « Est-ce que je compte ou est-ce que je suis accessoire? Est-ce qu’il y a un peu d’amour, est-ce qu’il pourrait y en avoir un jour ou tout n’est-il pour lui qu’un dérivatif, un divertissement? Pourrait-il être ébranlé dans ses certitudes, ses habitudes? » Une question qui est en tout point semblable à l’une de celles que je me suis posées plus d’une fois dans ma vie. Et à laquelle je n’ai quasi jamais été en mesure de répondre tant je demeurais dans ma marge et dans le flou en ce qui concerne ce que je vivais. Peut-être parce que : « si peu aura été dit en mots dans cette relation, tant aura été dit en gestes ».

Un certain Paul Darrigand est un roman émouvant, d’autant plus touchant qu’il ne concerne pas seulement la vie amoureuse de l’auteur, mais aussi la maladie et la peur d’en mourir. Je ne tarderai sûrement pas à lire le troisième volet. Donc, à suivre.

4 août 2024

Eléctrico 28

Filed under: À livres ouverts,Pour petites mains — Lali @ 15:10

Quel album réjouissant! Quel bonheur d’aller d’une page à l’autre afin de monter dans le célèbre Eléctrico 28 de Lisbonne, conduit par Amadeo, qui a à cœur d’aider les timides amoureux.

Pour susciter un premier baiser, il a imaginé trois manœuvres de freinage qui réussissent à coup sûr. Pour notre plus grand bonheur et celui des protagonistes qui n’osaient pas aller de l’avant.

Mais c’est bientôt pour Amadeo l’heure de la retraite. Il ne sera plus celui qui donnera un coup de pouce au destin. Et en plus, il n’a pas eu le temps de s’occuper de sa propre vie amoureuse, trop pris par celles des passagers du tram. Mais si le destin s’en chargeait?

Coup de foudre pour cet album écrit par Davide Cali et illustré par Magali Le Huche. Ou plutôt, énorme coup de foudre. Cet album est tout simplement charmant!

31 juillet 2024

Eux sur la photo

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 19:42

C’est encore à la suite d’une suggestion de mon amie brestoise que je me suis plongée dans Eux sur la photo d’Hélène Gestern, un roman que j’ai dévoré, rien de moins. Pour faire une histoire courte, Hélène cherche à identifier deux hommes sur une vieille photo dans laquelle sa mère (qui est morte quand elle avait trois ans et qu’elle n’a donc pas connue) apparaît. Pour cela, elle lance un appel à l’aide par l’entremise d’une petite annonce, qui se révélera fructueuse puisqu’un certain Stéphane reconnaît son père sur la photo. 

Du coup débute alors une correspondance entre eux afin d’élucider le mystère. Suivront des courriels, des appels téléphoniques, des messages textes et des rencontres. Ce qui semble être un secret de famille se révèle troublant et complexe, comme tout ce qu’on tente de cacher et qui finit par jaillir.

L’un et l’autre ne seront plus jamais les mêmes à l’issue de cette quête, laquelle donne lieu à un échange chargé d’émotions.

Eux sur la photo est un roman bouleversant. Nul ne peut en sortir intact et retiendra sûrement des phrases ici et là. Comme celle-ci : « … une fois né, l’amour, quelle que soit la destinée qu’on lui réserve, est irrévocable. » À lui seul, ce bout de phrase résume le passé dont il est question ici, soit le lien unissant la mère d’Hélène et le père de Stéphane, ce qui est en train de se tisser entre eux et ce qu’il adviendra de tout ceci.

J’ai beaucoup, beaucoup aimé ce roman. Je crois bien que ce ne sera pas le dernier roman d’Hélène Gestern que je lirai.

27 juillet 2024

Besson, à nouveau

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 15:21

Il y a bien longtemps, trop longtemps en fait, que je n’avais lu un roman de Philippe Besson. C’est donc avec grand bonheur que j’ai retrouvé la plume de cet écrivain. Un peu grâce à mon amie brestoise, qui se reconnaîtra sûrement.

Avec « Arrête tes mensonges », adapté au cinéma en 2023, ce que j’ignorais, Philippe Besson signe ici un roman autobiographique dans lequel il s’investit sans pudeur et sans faux-semblant. Il y est question de lui, de la vie, de ce qui fait ce que nous sommes, de son homosexualité, de ses rapports avec autrui, de l’écriture, du besoin de transposer le vécu autrement.

« J’écrirai souvent, des années après, sur l’impondérable, sur l’imprévisible qui détermine les événements », affirme-telle d’emblée dès les premières pages. Une façon de nous annoncer qu’il a toujours parlé de lui en détournant les faits, en les déconstruisant, en les déplaçant dans le temps, en modifiant les lieux, pour être en mesure de parler de cet imprévisible et impondérable.

« J’écrirai également sur les rencontres qui changent la donne, sur les conjonctions inattendues qui modifient le cours d’une existence. les croisements involontaires qui font dévier les trajectoires », écrit-il aussi.

Celui qui a toujours inventé des histoires en regardant les gens, en imaginant leur quotidien, leurs origines, et même leur destinée, jeu qui faisait dire à sa mère « Arrête avec tes mensonges », est devenu écrivain. Il ne pouvait en être autrement. Est-ce parce que je fais la même chose depuis que je suis enfant que j’écris moi aussi? Ce n’est pas impossible. Mais je m’éloigne…

« Arrête avec tes mensonges », où il nous raconte son premier amour, est un roman bouleversant. Rien de moins. Et en dire davantage, ce serait trop en dire et vous priver d’un grand bonheur de lecture en dévoilant certains détails.

20 juillet 2024

Au bord de l’abîme

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 20:00

Avec Danser au bord de l’abîme, Grégoire Delacourt signe un roman mettant en scène le désir. Un désir qui bouleverse une femme, au point qu’elle devienne prête à tout pour aller au bout d’un regard.

Elle s’appelle Emmanuelle, ou Emma, comme l’héroïne de Flaubert. Elle est mariée, a trois enfants. Elle est même heureuse. Mais. Mais la vie a mis sur son chemin un homme qui va faire basculer ses certitudes. Qui va allumer en elle un brasier dont elle ne pouvait imaginer l’existence. Elle n’en sortira pas indemme. Il en est ainsi du désir, de la passion, du vertige.

« Le présent est la seule certitude, la seule île possible dans le vide. » Oui, sûrement. « On peut continuer à vivre avec un désir inassouvi. » Peut-être, je n’en suis pas certaine. « Les mots qu’on ne dit pas sont ceux qui font le plus de mal. » J’ai des doutes.

Il y a tellement de phrases en dehors de celles-ci que j’ai notées tant elles me touchaient, suscitaient de questions ou se révélaient à la fois justes et fausses, parce que rien n’est jamais tout à fait blanc ou tout à fait noir.

Puis, il y a ce parallèle en continu avec la chèvre de Monsieur Seguin, qui ajoute à la puissance de ce roman qui se dévore d’une traite, tant il prend aux tripes, rien de moins.

Vous l’aurez compris : j’ai beaucoup aimé Danser au bord de l’abîme.

3 juillet 2024

À propos du désir

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 19:08

Claire Legendre a été une femcel (femme célibataire) pendant 10 ans. Sans qu’elle l’ait souhaité, précisons-le. Elle était donc bien placée pour parler du désir. Et elle l’aborde sous de nombreux angles dans son récit Ce désir me point. Désir de couple, désir d’intimité. désir de complicité, désir sain comme malsain, désir de désirer, désir d’être l’objet du désir, désir proche de l’envie (ou de la jalousie), désir troublant, désir déçu ou non comblé, il y a ici plus d’un aspect du désir examiné à la loupe de façon générale comme au vu de l’expérience personnelle de l’auteure.

« Le désir est une torture lancinante qui ne cesse que par son rassasiement ou par l’extinction de la vie dont il est la manifestation. » Probablement. Mais pas toujours. Pas pour tout le monde. Mais j’aime cette façon qu’a Claire Legendre d’en parler. Comme j’aime aussi : « L’écriture ne pouvait naître qu’en l’absence de satisfaction du désir. »

Ce récit a soulevé quelques interrogations et ouvert bien des portes sans les fermer. Tout devient donc matière à discussion, à élaboration, à échange. J’ai donc posté le livre à une femcel de mon entourage. Dans le but de savoir ce qu’elle a retenu, quelles questions lui sont venues en tête, ce à quoi elle a adhéré sans hésitation, les affirmations avec lesquelles n’étaient pas d’accord. Seront-elles les mêmes que les miennes?

« L’interdit est une invention merveilleuse pour augmenter la désirabilité. » Vrai ou pas? J’ai tendance à penser que oui pour avoir fait face à l’interdit moi-même et y avoir cédé. « Je désire que le désir ne soit jamais achevé pour qu’il dure. » Oui,aussi.

Les phrases que j’aurais pu noter sont bien plus nombreuses que les quatre citations faisant partie de ce billet. Qu’il s’agisse du désir d’amour, de désirer posséder, de désirer le désir de l’autre ou de désirer le pire, qui constituent les quatre sections de ce récit.

Décidément, Ce désir me point me suivra longtemps. Je n’ai pas fini de cogiter et de tourner et retourner certaines questions dans tous les sens.

29 juin 2024

Partis, les bobos!

Filed under: À livres ouverts,Pour petites mains — Lali @ 19:12

On a toujours besoin d’albums qui nous font sourire. C’est le cas de Partis, les bobos!, qui nous raconte où se retrouvent les bobos que lancent à bout de bras les parents de Renaud pour se débarrasser d’eux.

Écrit par Dominique de Loppinot et illustré par Anne-Marie Bourgeois, cet album fait le tour des bobos, des plus petits aux plus douloureux. On fait la connaissance du bobouffe du garçonnet qui vit dans la cabane de jardin et qui attend avec appétit le moindre bobo pour satisfaire sa faim. Et l’on y apprend que tous les enfants ont leur bobouffe personnel, prêt à avaler tout ce qu’on leur servira.

Amusant, oui. Plein de tendresse, oui aussi. Un album qui m’a beaucoup, beaucoup plu.


27 juin 2024

Ma vie d’espion

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 19:51

Parfois, on a juste envie d’un court roman sans prétention et distrayant. Ma vie d’espion de Thierry Horguelin est arrivé à point.

Pendant 73 pages, je me suis laissée emporter par cette histoire rocambolesque et tirée par les cheveux, pour qui n’aime pas trop plonger dans l’irrationnel et l’inexpliqué (voire l’inexplicable) – ce qui n’est pas mon cas. Et avec grand plaisir, en plus!

Véritable jeu de piste où les indices ne se révèlent pas toujours justes, mettant en scène un photographe s’imaginant vivre une vie d’espion pour colorer sa plus ou moins fade vie, Ma vie d’espion se laisse dévorer. Rien de moins. On veut savoir où cette enquête autour d’une mystérieuse galeriste nous mènera. Et vous ne serez pas déçus si d’aventure vous vous laissez prendre au jeu. Je n’en dis pas plus!

26 juin 2024

La danseuse

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 19:15

« Il n’y a pas de passé. ni d’étoile morte, ni d’années-lumières qui vous séparent à jamais les uns des autres, mais ce présent éternel », ai-je retenu du clin d’œil de Modiano au Petit prince de Saint-Exupéry à la toute fin de La danseuse. Une phrase qui pourrait résumer tous les livres de Patrick Modiano, que je lis depuis 1978.

D’aucuns affirment qu’il écrit toujours le même livre. Les mêmes qui s’ennuient à lire cet auteur qui fait partie de mes préférés. Mais qu’ils arrêtent de le lire et cessent d’en parler, celles et ceux qui l’apprécient n’en seront que plus heureux.

Il est question d’une danseuse à qui Modiano n’a pas donné de prénom, d’un univers un peu glauque comme on en trouve souvent chez lui, du temps qui passe et qui efface certaines traces, de ce qui est malgré tout inaltérable, et même de l’éditeur Maurice Girodias. Tout s’entremêle dans une sorte de désordre organisé. Il vous suffit de suivre le héros, d’accepter que tout ne vous soit pas raconté.

En fait, laissez-vous porter, ne résistez pas. Vous aurez droit à la nostalgie Modiano. Vous parcourrez les rues d’un Paris disparu, vous croiserez une danseuse, un futur écrivain, un enfant. Et vous vous laisserez prendre au jeu des silences, des omissions volontaires et de qui se scelle au-delà des mots.

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