Lali

30 janvier 2008

Les choses tristes

Filed under: États d'âme,Couleurs et textures — Lali @ 19:51

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Il y a quelques jours, au restaurant, j’ai lu à maman quelques poèmes qui n’étaient pas de moi.

Elle avait les yeux dans l’eau. « C’est triste », a-t-ellle dit. Puis, elle m’a regardée. « C’est tellement toi aussi. Tu as toujours aimé les choses tristes. Pourtant, toi si gaie. Lis encore. »

Et j’ai lu quelques poèmes encore, avant que les plats n’arrivent. Comme le fait peut-être la lectrice de Jos Van den Nieuwenhof pour sa mère.

« Il y a longtemps que je n’avais vue si heureuse. »

Les mères savent lire au delà des mots.

Quand le vent se tait devant le fado

Filed under: À livres ouverts,Trois petites notes de musique — Lali @ 19:06

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Seul le fado sait faire taire le vent qui ne peut que s’incliner devant une telle intensité, une telle émotion. Ce fado, si bien raconté sur du bleu dans mes nuages il y a quelques semaines, le fado d’Amalia Rodrigues, plus particulièrement, dont on peut lire une biographie et écouter quelques extraits ici. Cette Amalia dont je possède la discographie complète grâce à un ami et que je découvre peu à peu jour de grand vent ou de soleil. Parce qu’il n’y a pas d’heure ni de saison pour le fado. Il n’y a que la réponse en soi à l’appel de la nostalgie qui survient pour mille et une raisons ou pour aucune.

Et de toutes les chanteuses de fado, elle demeurera malgré toutes celles qui ont suivi ses pas, la plus grande. Car sans elle, le fado ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui. Il n’aurait pas cette renommée internationale et demeurait cantonné – peut-être – à quelques salles connus des seuls Lisboètes nostalgiques.

Elle a chanté les poètes. Elle a chanté les classiques. Elle a chanté ses propres textes. L’éditeur Hubert Nyssen a réuni quelques-uns de ceux-ci dans un florilège bilingue intitulé Le Fado d’Amalia.

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J’ai retenu de José Régio celui-ci :

Fado portugais

Le fado est né un jour
Quand le vent soufflait à peine
Et le ciel sortait de mer,
Sur le pont d’un voilier,
Dans le cœur d’un marin
Qui était triste et qui chantait.

Ah! quelle beauté plus immense,
Terre où je marche, ma montagne et ma vallée
Parmi feuilles, fleurs et fruits d’or,
Vois si tu vois les terres d’Espagne,
Les sables du Portugal,
Dans un regard aveuglé de pleurs.

Dans la bouche d’un matin
Sur ce fragile bateau à voiles
Le chant de douleur se meurt,
Dans la blessure du désir,
La lèvre brûlée de baisers
Qui embrasse le vent et rien de plus.

Adieu ma mère, adieu Marie,
Garde bien au fond de toi
La promesse que je te fais
De te mener jusqu’à la sacristie,
À moins qu’à Dieu ne plaise
De me donner la mer pour sépulture.

Mais voilà qu’un autre jour
Quand le vent soufflait à peine
Et le ciel sortait de terre,
À la proue d’un autre voilier
Se tenait un autre marin
Qui était triste et qui chantait.

Ah! quelle beauté plus immense,
Terre où je marche, ma montagne et ma vallée
Parmi feuilles, fleurs et fruits d’or,
Vois si tu vois les terres d’Espagne,
Les sables du Portugal,
Dans un regard aveuglé de pleurs.

Et d’Amalia elle-même :

Fados au fond de moi

Je porte en moi des fados,
Des tristesses dans le cœur.
Je traîne mes rêves perdus
À travers des nuits de solitude.
Je souffre en moi
Les vers et les notes
D’une grande symphonie jouée
Dans tous les tons de la tristesse
Et de l’agonie.
Je porte en moi
Des nuits de clair de lune,
Des plaines jonchées de fleurs,
Je porte le ciel et la mer,
Et des douleurs plus grandes encore.
Je porte en moi
Des amertumes mélangées,
Une lucidité et une faiblesse :
Je garde les yeux secs,
Bien qu’ils ne cessent de pleurer
Depuis que je suis enfant.

Et j’écoute sa voix. Et le vent ne souffle plus : il l’écoute lui aussi.

Poussée par le vent

Filed under: Couleurs et textures — Lali @ 18:10

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Le vent l’a poussée jusque chez elle. La lectrice de Jonathon Poliszuk n’est pas tombée sur la glace, ce coup-ci. Elle y est allée à petits pas, sans se presser, même avec le vent dans le dos et même si elle avait hâte d’être au chaud, de retirer ses botttes et son gros pull, et de s’étendre avec le livre de la veille, celui qui lui parlait de gares et de poésie.

Et je crois qu’elle est à Lausanne, en train d’hésiter avec le personnage principal, à savoir s’il doit retourner sur ses pas ou prendre la direction de Paris. Et je crois même qu’elle ne le lâchera pas le livre tant qu’elle ne saura pas qu’il a décidé d’aller au bout de son destin.

Ce que mots vous inspirent 14

Filed under: Ce que mots vous inspirent,Couleurs et textures — Lali @ 8:01

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De toutes les formes de prudence, la prudence en amour est peut-être celle qui est la plus fatale au vrai bonheur. [Bertrand Russell]

Voilà plusieurs fois que le lecteur d’Alfred Roll relit la citation de Bertrand Russell. Il n’est pas du tout sûr d’avoir le talent pour la commenter et encore moins le recul.

C’est donc à vous qu’il demandera de commenter la phrase. De l’éclairer. De lui dire ce que vous en pensez.

La phrase est à vous jusqu’à mercredi prochain. Pour ce que mots vous inspirent. La toile aussi, d’ailleurs.

Équilibre précaire

Filed under: Couleurs et textures — Lali @ 6:53

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Que lui a-t-elle raconté de sa vie pour que l’artiste Eleonore Stängle-Worel la voit ainsi? Pour qu’elle donne l’impression d’une femme tentant de maintenir un équilibre précaire en continu? Pour qu’on sente cette urgence de tout concilier avec le peu de temps dont elle dispose? Oui, qu’a-t-elle bien pu dire d’elle pour qu’il en soit ainsi?

La lectrice des rives et des bords de mer

Filed under: Couleurs et textures — Lali @ 6:34

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Les rêves qu’on lance dans l’Atlantique d’une plage de Bretagne ou d’un port de Nouvelle-Angleterre finissent-ils par se rejoindre quelque part entre les deux? Finissent-ils par engloutir les larmes versées dans la Mer du Nord ou les espoirs jetés comme une poignée de sable dans la Méditerranée? Retrouvent-ils les quelques lignes d’un poème qui s’est oublié dans les vagues du Pacifique?

Peut-être bien. Peut-être pas. Il y a tant de lacs, tant de rivières, tant de fleuves et quelques océans pour avaler les mots que la lectrice de Grace Cossington Smith lit tout haut depuis des années avec pour seuls complices les eaux des paysages où elle s’asseoie. Sans savoir ce qu’ils deviendront. Sans savoir s’ils se mêleront aux rêves et aux espoirs qu’elle a pu laisser sur leurs rives.