Un son a disparu
J’aime les romans qui présentent un défi tant au plan de l’écriture que de la traduction. C’est le cas du roman Un son a disparu, de Rodrigo Muñoz Avia, traduit de l’espagnol par Anne Cohen Beucher.
Au départ, une disparition, celle d’Éléonore, la meilleure amie de Jorge, la narrateur de ce roman destiné aux adolescents. Une disparition inexplicable et qui ne laisse présager rien de bon. Une disparition qui pousse Jorge à faire disparaître la lettre E, comme un certain Perec, jusqu’à ce que son amie soit retrouvée, ce qui donne lieu à la création d’une langue qu’il appelle son charabia. Une langue pas toujours facile à comprendre pour celles et ceux qui croisent Jorge, qui n’en comprennent pas toujours le mécanisme. Quel tour de force, quelle imagination!
En espagnol, la lettre A est la lettre plus courante et non le E, comme c’est le cas en français. Le roman La disparition de Georges Perec, devenu en espagnol El Secuestro, ne contient pas de A, comme n’en contenait pas la version originale du roman Un son a disparu. La traduction en français, pour cette raison, fait disparaitre le E de la bouche de Jorge. Pas de mots contenant un E dans ses phrases dites à haute voix. Seulement dans sa narration.
Un bel exercice de style en même temps qu’un roman enlevant. Et en ce qui me concerne, un coup de foudre pour le père de Jorge, libraire de profession et fou de Perec.