Tout roman portant sur les librairies et les bibliothèques m’attirera toujours. Je ne pouvais donc pas passer à côté de La bibliothèque des petits miracles. Sa lecture m’a apporté quelques heures de détente, même si j’ai compris dès les premières pages que j’aurai droit à un dénouement heureux.
En bref, l’histoire raconte comment un groupe de citoyens fait tout ce qu’il peut pour sauver de la fermeture sa bibliothèque locale. Les façons d’y parvenir sont originales, il y a beaucoup d’humour dans ce roman. Il y a même une histoire d’amour qui prend bien du temps à prendre son envol. Mais on sait bien que ces deux amis d’enfance finiront bien par se rendre compte qu’il y a plus que de l’amitié entre eux. Car tout est prévisible, je vous l’ai déjà dit.
La bibliothèque des petits miracles n’est pas le meilleur roman portant sur les bibliothèeques que j’aie lu, mais je ne me suis pas ennuyée une minute, ce qui est déjà beaucoup. Je n’hésite donc pas à le recommander à quiconque aime autant que moi les librairies et les bibliothèques.
Paris, années 1920. Paris, années 1980. Madrid, 2019. C’est un voyage dans le temps et dans l’espace qui nous est proposé dans Les muses ne dorment pas, de l’écrivaine Zoé Valdés, d’origine cubaine, que je connaissais de nom, mais dont je n’avais encore jamais lu de roman.
Et quelle belle découverte pour celle qui aime autant la littérature que la peinture! J’ai littéralement dévoré ce roman dans lequel Bonnard et Balthus tiennent une grande place, mais pas qu’eux. Mais celles qui les ont inspirés : ces muses qui ne dorment pas. Celles qui ont posé pour subvenir à leurs besoins. Mais aussi celles qui se sont éprises d’artistes qui ne souhaitaient pas faire d’elles des épouses. Celles qui n’ont rien oublié. Celles qui tentent de retrouver ce qu’elles étaient autrefois dans des tableaux qui datent d’un demi-siècle. Toutes ces femmes, jeunes et jolies, dont les courbes ont fait rêver et qui demeurent souvent indissociables de ceux qui les ont mises au monde, d’une certaine façon.
S’aventurer dans Les muses ne dorment pas, c’est accepter une promenade au pays de ces muses et ne pas s’attendre à quelque chose de chronologique, car c’est loin d’être le cas ici. C’est surtout se laisser prendre au jeu, accompagner Zoé Valdés dans les dédales qu’elle propose. Oui, oui, oui, j’ai beaucoup aimé ce roman!
Si tous les tubes de peinture éclataient de rire… Si toutes les ailes se donnaient la plume…Si toutes les maisons se donnaient la fenêtre… Si toutes les rues se donnaient la planète…Si tous les livres, dans toutes les langues, se donnaient la page… Si tout cela était possible, si tout cela arrivait… C’est ce propose ce magnifique album écrit par Alain Serres et illustré par Aurélia Fronty.
Chaque proposition ouvre des perspectives qui font rêver à un monde meilleur. Et pourquoi ne pas rêver que tout est possible? Pourquoi se l’interdire? Je ne vois pas pourquoi. Je vous invite donc, peu importe votre âge, car il n’y a pas d’âge pour rêver, à vous offrir cet album et à l’ouvrir à n’importe quelle page. Vous sourirez, vous vous envolerez, vous oublierez les soucis, vous aurez un sourire grand comme ça. Si, si, je vous l’assure.
Les ruptures se ressemblent-elles toutes? Combien semblent définitives alors qu’elles ne le sont pas vraiment? C’est en quelque sorte ce qu »aborde Hélène Gestern dans Un vertige, suivi de La séparation. Dans l’un comme dans l’autre de ces deux courts romans, elle décortique l’après-amour avec une grande lucidité. Il ne sert à rien d’idéaliser ce qui a été. «… on ne peut éprouver la nostalgie d’un espace auquel on n’a pas appartenu », Et pourtant, la narratrice y a tellement cru, comme d’autres, comme moi quand « on apprend la grammaire d’une peau, d’un désir, d’un regard » et quand « on se plonge dans l’énigme d’un être inconnu, ce gouffre merveilleux… »
Pourquoi se perdre une nouvelle fois dans ce qui finira par nous blesser? « Il conviendrait sans doute de se demander ce que l’on recommence au juste lorsque l’on marche dans les traces sentimentales déjà frayées, en sachant qu’on y a déjà perdu et l’amour et l’humour. » La narratrice se pose la question, ne trouve aucune réponse appropriée. Elle sait seulement l’espoir, les doutes, la chute. Et elle n’est sûrement pas la seule à se questionner ainsi. Je me suis retrouvée dans cette situation plus d’une fois alors que j’ai marché à nouveau dans les pas du passé en compagnie de l’un, de l’autre.
J’ai été extrêmement touchée par ces romans. Je me suis souvent arrêtée pour relire des passages, noter des phrases qui m’atteignaient. Pour réfléchir. Pour sonder mon cœur. Pour me demander si :« je voudrais retrouver le cercle de ses bras, mais surtout l’envie d’en être la prisonnière. » Et je me le demande encore.
Dès les premières pages de La librairie Morosaki, vous tomberez sous le charme et vous irez de page en page avec ce même plaisir tant ce roman est réjouissant. Véritable invitation à la lecture, mettant en scène une jeune femme qui se relève d’une rupture amoureuse et qui n’a jamais lu dans sa vie, ce roman d’un peu moins de 200 pages vous donnera envie de lire, de découvrir la littérature japonaise et de profiter du moment présent. Comme apprend à le faire Takado alors qu’elle se retrouve chez son oncle, qui a repris la gestion de la librairie d’occasion familiale.
C’est là, au milieu des livres, qu’elle découvre la passion de lire. Celle-ci ne la quittera plus, la poussant à découvrir des écrivains et des styles, à rencontrer des personnes qui ont ce même intérêt, cette soif inextinguible qui est la mienne. Est-ce la libraire que j’ai été pendant un quart de siècle ou la dévoreuse de livres depuis toujours qui a été séduite? Je ne suis pas en mesure de pencher pour l’une ou l’autre des réponses. C’est sûrement un mélange des deux.
À dire vrai, j’ai eu du mal à quitter ce roman tant j’y étais bien, tant j’aimais cette atmosphère, tant j’aurais voulu entrer dans cette librairie et dans toutes celles installées dans cette rue, chacune ayant sa spécialité, de la littérature moderne aux manuels scolaires. Je m’imaginais facilement passer là des heures et des heures et rentrer avec des provisions pour des semaines. J’aime tellement les librairies d’occasion que je ne dirais pas non plus tard, l’heure de la retraite venue, à travailler quelques heures par semaines dans un tel lieu, ou alors au bureau de poste.
Mais je n’en suis pas là. Je vais continuer à fréquenter ces endroits et à lire, lire, lire.
Quand on entre dans l’univers de Natan, jeune Juif forcé de quitter Berlin en 1942 pour sauver sa peau, en laissant les siens derrière lui, il nous est impossible de ne pas dévorer 40 manteaux et un bouton, un roman inspiré d’une histoire vraie, tant le héros est attachant. Et aussi parce que l’on souhaite qu’il s’en sorte, et que ces enfants qui l’accompagnent s’en sortent aussi. C’est donc l’aventure de 40 enfants qui nous est racontée ici, 40 enfants sauvés par un village d’Italie, pas très loin de la frontière avec la Suisse. Oui, sauvés par les habitants d’un village qui se sont donné la main pour que ces enfants puissent vivre en toute sécurité, tout en continuant à être des enfants, malgré la peur, malgré la guerre, malgré les chemises brunes.
Il y a donc des moments tristes, des moments gais, tous attendrissants, parce que racontés avec finesse et avec cœur. C’est d’ailleurs cette tendresse omniprésente qui donne au premier roman d’Ivan Sciapeconi toute sa force et qui le rend inoubliable.
Certains pourront trouver qu’ils ont déjà lu suffisamment sur le sujet, qu’il s’agisse de témoignages ou de romans. Ce n’est pas mon cas.
Je n’avais rien lu de Francis Dannemark depuis des années. J’ignorais même qu’il était décédé en 2021. Preuve qu’il m’arrive d’être tellement dans ma bulle que je me trouve totalement déconnectée de tout, et surtout depuis la pandémie, devrais-je ajouter. En fait, ce n’est que depuis le début de 2024 que j’écris à nouveau, que je parle à nouveau d’une partie des livres que j’ai lus, même si je manque à nouveau de temps depuis quelques semaines.
Pourtant, j’ai conservé un excellent souvenir de tous les romans de Francis Dannemark, sauf un. C’est dire que je me réjouissais d’entamer la lecture de Martha ou la plus grande joie. Et je n’ai pas été déçue. Ce roman autour d’une rencontre entre Jeanne, une vieille dame et les enfants d’un homme qu’elle a aimé, Martha et Martin, est plein de tendresse et d’espoir.
C’est Martin qui se fait le narrateur de cette rencontre et des événements qui ont suivi, lesquels ne se seraient peut-être pas produits sans une panne de voiture salutaire. En frère protecteur, il surveille de près sa sœur qui, à la suite d’un accident, a perdu des grands pans de sa mémoire, mais pas son sourire. Et il s’émeut de la voir sortir de son mutisme et constater à quel point la nature, la rivière et les oiseaux lui sont bénéfiques.
Et si la joie de vivre était toujours en nous? Si elle attendait son heure pour se manifester?
« On se raconte tous des histoires pour continuer à avancer », affirme le narrateur. Et j’ai envie de dire : heureusement.
Je crois bien qu’il va me falloir lire tous les livres de Francis Dannemark que je n’ai pas lus après ces retrouvailles.
C’est parce que j’avais promis à un ami qui avait lu ce livre que je suis allée jusqu’au bout de La faille en toute chose. Presque contre mon gré, car j’ai lu les 30 premières pages quatre fois avant de m’attaquer au reste. Peu à peu. Pas très convaincue. Me demandant où allait me mener cette enquête de l’inspecteur Gamache. Il faut dire que, de dédale en dédale, on finit par se demander si Louise Penny ne s’est pas perdue elle-même en nous éloignant de l’enquête de départ, soit trouver qui a assassiné Constance Ouellet, l’une des célèbres quintuplées.
N’était-ce pas suffisant? Fallait-il ajouter une couche, puis deux, puis trois, et nous entraîner dans un complot énorme auquel on ne croit pas vraiment tant il est invraisemblable? De plus, était-il vraiment nécessaire de nous fournir une multitude de détails sans intérêt, comme des descriptions à n’en plus finir et des remarques qui ne sont pas des indices? On finit même par se demander si l’auteure est payée au nombre de mots tant on étire la sauce avec du superflu.
Décidément, je n’ai pas beaucoup de bien à dire de ce thriller qui finit en queue de poisson, autant pour l’enquête de départ (le meurtre de Constance Ouellet), bâclée en deux temps trois mouvements que pour le complot désamorcé – et heureusement. Ainsi, tout est bien qui finit bien.
J’ai été déçue par cette première enquête de Louise Penny que je lis alors que tout le monde dit du bien de ses livres. Et déçue est bien faible pour dire à quel point ce roman m’a tapé sur les nerfs. À chaque début de chapitre, je me demandais si on allait en savoir plus sur l’enquête de départ ou si on allait encore s’aventurer ailleurs pour nous faire part d’histoires parallèles, ce qui était le cas trois fois sur quatre.
Les ressemblances avec les sœurs Dionne m’ont agacée. Les apartés portant sur la vie de Gamache ne révélaient rien qu’il vaille la peine de les fournir. Et que dire de cette fin (de ces fins) où tout se règle à toute vitesse alors que l’auteure nous avait habitués à la lenteur en laissant traîner les choses? Était-elle lasse de ses personnages? Avait-elle atteint le nombre de mots demandé par son éditeur? Et que vient faire ici ce titre inspiré par une chanson de Leonard Cohen?
Je ne pense pas lire un autre roman de Louise Penny de sitôt après cette pénible expérience. À moins que j’aie lu son plus mauvais livre? Je n’ai pas envie de prendre la chance de bailler et de vérifier régulièrement combien il me reste de pages à lire. Il y a trop de bons livres qui m’attendent dans mes piles!
« … est-il donc si urgent, si pressant, si important de nouer un lien étincelant? » C’est un peu la question que se pose Anna, l’héroïne du roman d’Anne Serre, Les débutants. Un roman où il est question d’amour, de celui confortable comme un lit douillet dans lequel vit Anna depuis 20 ans avec Guillaume. Un roman où il est aussi question d’un coup de foudre, de celui que ressent Anna pour Laurent, et vice versa. Un roman qui fait le tour des émotions que cela suscite en elle, de l’état de trouble dans lequel elle se trouve à l’heure du choix de passer des bras de l’un à ceux de l’autre. « Une vie sans tristesse, est-ce une vraie vie? » C’est aussi ce que se demande Anna, chagrinée d’avoir peiné Guillaume et à l’idée de mettre fin à la stabilité pour quelque chose qui ne s’annonce pas aussi solide. Mais tout de même irrésistible, comme l’est souvent un nouvel amour.
Le roman d’Anne Serre est une sorte d’enquête sur le sentiment amoureux, une analyse que certains pourraient trouver fastidieuse tant elle est détaillée. Mais ce ne fut pas mon cas. Je me suis laissée emporter par les images, par les mots, par le rythme, et ce, jusqu’à la dernière page. Trouvant écho en moi à cette phrase : « Quelques semaines, quelques mois au pire, et un matin l’on se réveillera tout surpris de ne plus rien sentir, de ne plus aimer, et l’autre sera comme quelqu’un qui n’a jamais existé, on sera étonné d’avoir été lié par toutes les fibres de son être à cette image qui s’est dissoute. » Elle me semble si vraie.
Je n’en avais pas fini avec Philippe Besson. Il a fallu que je me plonge dans le deuxième tome de ses trois romans autobiographiques sans tarder. Et je n’ai pas été déçue. En fait, je suis chaque fois séduite par la plume de cet écrivain, par sa façon bien à lui de nous livrer les émotions de ses personnages. Et c’est particulièrement bouleversant quand il parle de lui et de ce qui l’a uni à un certain Paul au début de la vingtaine, un homme marié. Une liaison qui lui fera se demander : « Est-ce que je compte ou est-ce que je suis accessoire? Est-ce qu’il y a un peu d’amour, est-ce qu’il pourrait y en avoir un jour ou tout n’est-il pour lui qu’un dérivatif, un divertissement? Pourrait-il être ébranlé dans ses certitudes, ses habitudes? » Une question qui est en tout point semblable à l’une de celles que je me suis posées plus d’une fois dans ma vie. Et à laquelle je n’ai quasi jamais été en mesure de répondre tant je demeurais dans ma marge et dans le flou en ce qui concerne ce que je vivais. Peut-être parce que : « si peu aura été dit en mots dans cette relation, tant aura été dit en gestes ».
Un certain Paul Darrigand est un roman émouvant, d’autant plus touchant qu’il ne concerne pas seulement la vie amoureuse de l’auteur, mais aussi la maladie et la peur d’en mourir. Je ne tarderai sûrement pas à lire le troisième volet. Donc, à suivre.