Dans un coin du café
Le lecteur de Gavin Glakas s’est assis à la table du café où il s’assied tous les soirs. Il y reste parfois si longtemps qu’il peut lire là un livre en entier en un soir. D’autres fois, il traîne jour après jour le même livre dont il ne semble jamais repu. C’est le deuxième soir qu’il va sans ordre dans Un chant dans l’épaisseur du temps de Nuno Judice. Et il a beau aller ici et là, dans le désordre et l’envie de se laisser porter par les mots, c’est toujours sur ces lignes qu’il revient :
Dans un coin du café, ce que tu recherches, c’est que le poème
te dise qui tu es, pourquoi tu te caches, quel est le nom
de la fille qui t’a regardé fixement.
Et tu n’as pas de réponse.
La réponse était sur les lèvres de cette fille
que ton silence n’a pas su interroger;
et dans le vent qui balayait l’esplanade,
emportant feuilles et papiers.
L’automne : une image, celle de ta propre vie,
que tu n’as pas su ignorer;
pour que d’une banale conversation avec l’inconnue,
surgisse une image, cette autre,
de la vie que tu aurais aimé ne pas perdre,
à chaque instant, entre tes doigts et tes vers.