Par monts et par mots 1
Elle était belle et lisait Éluard
Elle épousait la grâce de l’été
Son corps avait les attraits d’une plage
Je m’approchai sur la pointe des yeux
Bernard Noël, Par monts et par mots
*choix de la lectrice d’Andre Kohn
Elle était belle et lisait Éluard
Elle épousait la grâce de l’été
Son corps avait les attraits d’une plage
Je m’approchai sur la pointe des yeux
Bernard Noël, Par monts et par mots
*choix de la lectrice d’Andre Kohn
Sous une apparente légèreté où s’additionnent ces petits détails qui donnent au quotidien les couleurs de l’enfance se profile le monde trouble et troublant des questions et des doutes. La petite fille sait si peu de la vie. Elle découvre donc, sans l’aide de quiconque la plupart du temps, ce qui fait vibrer, ce qui déçoit ou ensorcelle : toutes ces choses qui la font grandir alors qu’elle voudrait jouer avec ses Barbie encore un peu en mâchant de la gomme balloune.
Mais l’abandon du père a absorbé une partie de ses rêves. Et l’isolement auquel elle a été contrainte à la suite d’un déménagement loin, très loin de la ville, l’a prise en étau. Tant et si bien qu’elle se raconte des histoires pour ne pas tomber. Ne pas vieillir. Ne pas mourir. C’est ainsi que la petite fille devient, sans qu’elle ne s’en rende compte, pas plus que son entourage, une grande petite fille qui sait peser le pour et le contre, et se justifier au besoin.
C’est, entre autres, ce que raconte Rose amer, le roman de Martine Delvaux. Avec finesse, choix de mots, regard impressionniste et souci du détail, celle qui a signé Les cascadeurs de l’amour n’ont pas droit au doublage, brosse des personnages à gros traits — les rendant ainsi plus vrais que vrais — et nous décrit un milieu (qui pourrait parfois être sordide) avec les yeux d’une enfant qui sait s’accommoder de toutes les situations.
C’est là la force d’une auteure qui n’a peur de dire les choses. Parce qu’elle a osé regarder ce qu’il y a de pire dans l’être humain, tout en se glissant dans la peau d’une petite fille timide et effrayée par tout ce qui déroule autour d’elle, malgré l’amitié et malgré les belles histoires qu’on tisse pour y enfouir les moins belles, Martine Delvaux signe à nouveau un roman remarquable où âmes troublées et troublantes se côtoient. Pour un jour laisser derrière elles le trop glauque de cette banlieue stagnante que les jeux et les rires ne peuvent impunément dissimuler.
Se terminait hier soir le Festival International Nuits d’Afrique. J’y suis allée trois fois, question de faire bouger mes orteils, de m’imprégner de couleurs, de faire provision de sourires et de me sentir au bout du monde.
Pour vous, quelques images du Marché Tombouctou, l’une des activités de ce festival exceptionnel, chaleureux et coloré.
Le vrai écrivain n’est pas celui qui raconte des histoires, mais celui qui se raconte dans l’histoire. La sienne et celle, plus vaste, du monde dans lequel il vit. (Philip Roth)
*illustration de George Hughes