Quand les montagnes deviennent des collines
Ce n’est pas en faisant des piles que je vais venir à bout de toute la paperasserie accumulée. Je le sais, j’ai essayé. Il n’y a qu’un moyen: prendre chaque bout de papier, chaque facture, chaque chemise du classeur, chaque carnet, un par un. Et voir ce qui est encore utile et ce qui n’est qu’une traînerie de plus.
Et j’ai fait cela pendant plus de trois heures, rempli deux sacs à ras bord, l’un pour le recyclage et l’autre pour le déchiquetage. Les piles sont moins hautes, le classeur se vide lentement des factures payées depuis belle lurette et les catalogues périmés serviront à autre chose.
J’avais vraiment ce soir envie d’éliminer un peu d’inutile, un peu de tout ce qui encombre l’espace et la mémoire, un peu de ce qui fait que je me sente envahie par ce qui n’a plus de raison d’être. Et pourtant, c’est moi et personne d’autre qui ai laissé ces montagnes gruger mon espace vital. Et pourtant c’est bien moi qui n’ai pas pris le temps, préférant le rêve, les livres, la musique et les conversations à ce rangement de papiers plus que nécessaire. À quoi pourrait en effet servir une facture de 2002 d’une carte de crédit que je ne possède plus ? Et ce bout de papier avec un numéro de téléphone et pas de nom ?
Il était temps. Mais je n’ai pas fini. Je n’arrêterai que quand seul ce qui est vital aura gagné le classeur vidé de l’inutile. Mais pour ce soir, ce sera assez, je ne possède pas assez la passion du ménage pour continuer. Même si je suis contente quand les choses sont à leur place. D’ailleurs, au travail, elles le sont toujours, c’est chez moi que je ne possède aucune discipline – enfin, pas assez -, parce qu’il y a trop de tentations dans mon appartement, toutes plus invitantes les unes que les autres. Voilà le hic.
Mais bon, je suis fière de moi. Ce qui est fait n’est pas à refaire et je vais tenter de démêler chaque jour un peu de ces montagnes qui jonchent mon bureau et le salon. Tant que ce n’est pas fait, ça a toujours l’air affolant. Et puis, quand on a fait le tour, on se rend compte qu’au fond, ce n’était pas si terrible que ça. Curieux, tout de même.