Sables 1
nager
jusqu’à la page
infinie
parmi les vagues
d’un corridor
éternel
Jocelyne Boisvert, Sables
*choix de la lectrice de Péter Jacab Szöke
nager
jusqu’à la page
infinie
parmi les vagues
d’un corridor
éternel
Jocelyne Boisvert, Sables
*choix de la lectrice de Péter Jacab Szöke
Ouvrir un livre dont on a aimé le titre et l’illustration de la couverture est toujours un moment très spécial, parfois même empreint de fébrilité, selon les attentes suscitées. D’ailleurs, c’est un peu ce à quoi j’ai été confrontée avec Le mot sans lequel rien n’existe, un album écrit par Claude Clément et illustré par Sylvie Montmoulineix, qui a attiré mon attention par son titre sur la tranche. Un livre qui m’a d’emblée séduite par la beauté de ses illustrations et par le fait que le « héros » du livre est un livre. Un livre abandonné sur une plage et auquel un oiseau emprunte quelques mots qu’il sème au hasard de ses voyages afin de combler les manques et de guérir les maux. Jusqu’à ce que celui-ci, après avoir déposé tous les mots qu’il avait emportés avec lui dans ses pérégrinations, se rende compte qu’il y a pour contrer les petites et grandes peurs, les guerres de toutes sortes, les écarts entre les privilégiés et ceux qui ne le sont pas, les conditions déplorables dans lesquelles certains vivent, les disparités qui ne devraient pas exister, les erreurs dont l’importance est variable, les effets malheureux de situations parfois irréversibles, un mot. Un seul mot. Un mot tout simple. Un mot que tout le monde connaît. Un mot qui fait briller les yeux et ouvrir les bras.
Ce mot, ce mot de cinq lettres, sans lequel rien n’a existé, n’existe et n’existera, est l’objet de ce magnifique album qui constitue une porte ouverte au débat et aux questions entourant toutes les inégalités et les injustices dont sont victimes enfants et adultes du monde entier.
Le mot sans lequel rien n’existe : un album poétique et artistique, publié en collaboration par les éditions de la Martinière et Amnistie Internationale, que tout enfant devrait posséder.
Lu dans le cadre du Challenge Le Nez dans les livres – Saison 2
J’ai beau avoir quitté le monde de la librairie il y a plus de sept ans, il y a une part de moi qui demeurera à jamais un peu libraire malgré ma désertion d’abord involontaire, puis assumée par la force des choses. Tout ça pour dire que lorsque je fréquente les librairies, il n’est pas rare que je reclasse des titres — probablement retirés des rayons par des lecteurs pour lire des quatrièmes de couverture, et visiblement replacés au hasard sans souci de l’ordre alphabétique pourtant flagrant du rayon en question. Une manie qui amuse en général les libraires qui me voient faire et à qui je m’empresse de dire que j’ai été des leurs pendant près d’un quart de siècle.
Mais je dépasse parfois les bornes. Ou du moins ai-je l’impression que j’en fais un peu trop. Surtout quand je fais la même chose dans une bibliothèque. Mais je me vois mal fermer les yeux sur une vingtaine de pièces de théâtre (dont la cote Dewey commence par 842) intercalés ici et là dans la section poésie (dont la cote commence par 841).
J’ai donc retiré tous ces titres mal classés et les ai déposés dans le chariot d’une préposée au rangement qui n’a pas semblé enchantée par ma manœuvre. Mais vraiment pas. Vous auriez dû voir son regard meurtrier. Même après mon explication.
Mais bon. On aura beau faire. Je serai à jamais un peu, juste un peu, libraire.
*illustration de Jon Turner
Les mots possèdent ce prodigieux pouvoir de rapprocher et de confronter ce qui, sans eux, resterait épars dans le temps des horloges et l’espace mesurable. (Claude Simon)
*illustration de Beatriz Barbero