À ceux-là, un poème de Gérald Godin
C’est le poète – et homme politique – Gérald Godin qui a eu les faveurs de la lectrice de Mary Barnes Gingrich, lorsqu’elle a parcouru La poésie québécoise, une anthologie signée Laurent Mailhot et Pierre Nepveu.
À ceux-là
Et que tremble au moins la main
quand le coup part
ils ne sont pas de ceux
qui prennent le monde par la taille
ils ne sont pas de ceux qui donnent
leur nom à des villes
leur nom à des rues
ils courent tout comme jadis
mais comme des hommes sans mains
treblinka oswiecim lauzon coaticook
c’est toujours la même voix qui se plaint
c’est toujours la même tendre peau humaine qu’on déchire
c’est toujours les mêmes yeux qui se baissent
nul bruit de cristal en eux
nul reflet de miroirs
nul mystère dans leur regard
quelques mensonges et c’est tout
nul indien nul nuage nul andin
je ricane parmi les miens
ils sourient tous au bourreau
ils tremblent de peur aussi
nulle course nulle bravoure nuls cris
ils se taisent quelquefois
ils croisent quelquefois l’amour
et lui-même ne les reconnaît pas