Poèmes chinois 1
La lectrice du peintre Nicolaas van der Waay n’a pas jeté un regard à la pile de recueils sur la table. Sans hésitation, elle s’est dirigée vers les rayons. Elle savait exactement quel livre elle voulait ouvrir, lequel elle voulait partager avec les lectrices du soir. Elle s’est donc installée en compagnie de Nuages immobiles et a laissé le livre ouvert sur ces vers du poète Yang Fang :
L’union amoureuse
L’amant détourne à lui la pointe de l’aiguille de fer
Le verre en fusion rassemble le feu et la fumée
L’aigu et le grave tonnent à l’unisson des accords parfaits
Et les cœurs voisins s’attirent toujours à l’intime
Mon amour me lie à toi comme l’ombre au corps
Nous dormons côte à côte sous des draps de trame fine
Dont la soie généreuse provient de cocons jumeaux
Aux heures chaudes, nos éventails sont deux ailes qui se touchent
Aux heures froides, nos épaules s’embrassent sur la natte feutrée
Tu ris soudain et me voilà hilare
Tu t’affliges alors et ma joie s’évanouit
Allant, je joins mes as aux tiens
Partant, nous partageons la poussière du chemin
Inséparables, comme les lions des portes célestes
Je ne recherche que ta présence
Et je ne crains que ta distance
Unissons nos corps en une seule forme
Partageons nos vies dans une chambre commune
Et dans la mort, scellons nos os sous un seul tombeau.
Le poète qui sut dire l’amour au plus vrai;
Le nôtre surpasse encore les mots.