Les cahiers de Jane Austen
Il y a à la British Library, à Londres, une des plus belles collections au monde de manuscrits d’écrivains. Et qui n’a jamais vu un manuscrit n’a aucune idée de ce qu’est l’écriture. Qui n’a pas connu ou vu de près toutes les étapes, l’élaboration minutieuse de ce qui va devenir le texte final, ne sait rien ou très peu de l’acte d’écrire.
Quand, en 1988, je me suis retrouvée devant les cahiers de Charlotte Brontë et de ses sœurs, de Jane Austen et de quelques autres, j’ai ressenti une vive émotion. J’avais devant moi les ratures, la calligraphie, les taches d’encre, les dessins en marge. J’étais tout simplement fascinée.
Ce sont les pages de Jane Austen, la célèbre romancière anglaise qui commençait à redevenir à la mode, qui a attiré mon attention. Le papier, les cahiers, tout ce qui nous semble évident, étaient à l’époque une denrée rare. Il fallait souvent aller en ville, et pas toujours la plus proche, pour trouver ces feuilles sur lesquelles des histoires allaient se bâtir. Et cette difficulté à s’approvisionner a fait que Jane Austen a utilisé avec parcimonie ses cahiers. D’une écriture fine, elle a rempli des pages et des pages à la suite, sans marge. Pas de gaspillage chez elle.
Pouvoir voir, sous la vitre, ces mots en lettres minuscules, à peine pâlis, de la main de Jane Austen, a constitué un des grands moments de ma tournée londonienne. Un de ces moments qui restent gravés et qui, des années plus tard, m’inspirent encore.