Le coffret 4
Supplication
Tes yeux, impassibles sondeurs
D’une mer polaire idéale,
S’éclairent parfois des splendeurs
Du rire, aurore boréale.
Ta chevelure, en ces odeurs
Fines et chaudes qu’elle exhale,
Fait rêver aux tigres rôdeurs
D’une clairière tropicale.
Ton âme a ces aspects divers :
Froideur sereine des hivers,
Douceur trompeuse de la fauve.
Glacé de froid, ou déchiré
À belles dents, moi, je mourrai
À moins que ton cœur ne me sauve.
Charles Cros, Le coffret de santal
*choix de la lectrice de Rembrandt Peale
La vestale aux douces rondeurs
Menait l’existence idéale
De ceux qu’abrite la splendeur
D’une forteresse ecclésiale ;
C’était un havre de candeur,
Un paradis pour la moniale ;
On n’en sentait pas la fadeur,
Ni la routine un peu triviale.
Mais quand l’arbre redevint vert,
Quand le printemps chassa l’hiver,
Elle rêva d’étreindre un fauve ;
Le cloître n’est plus un rempart,
Nous la voyons sur le départ :
Avec un troll, elle se sauve.
Comment by Cochonfucius — 20 janvier 2015 @ 9:54