Lali

5 juin 2013

La vie est un roman

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 19:31

Valaida Snow a eu une vie tellement rocambolesque que les rares biographes qui se sont intéressés à elle ont eu du mal à démêler le vrai du faux tant celle-ci s’est appliquée à enjoliver ou à noircir certains épisodes de sa vie au profit du public à qui elle s’adressait, tant et si bien que la trompettiste, comédienne et chanteuse métisse avait tout pour devenir un personnage de roman. C’est ce à quoi s’est employé Pascal Rannou dans Noire, la neige, qui est à la fois le portrait d’une époque, une histoire du jazz et celle d’une femme que (presque) rien n’a arrêtée au cours d’une vie qu’il a beaucoup romancée afin que Valaida Snow se trouve mêlée à tous les événements importants de l’histoire des États-Unis comme du reste du monde.

Née en 1902 à Chattanooga (Tennessee), ville immortalisée par Glenn Miller, Valaida Snow n’est pas restée longtemps dans son Sud natal, appelée ailleurs par la musique ou pour fuir la ségrégation raciale. Chicago, New York, Paris ne sont là que quelques-unes des nombreuses villes où elle a posé ses valises, en compagnie des siens ou seule, alors qu’elle tentait de se tailler sa place parmi les grands de la musique, aux côtés de Louis Armstrong et de Django Reinhardt.

Où est le vrai dans ce roman inspiré par Valaida Snow? Faut-il vraiment le chercher alors que celle dont il est question s’est amusée toute sa vie à brouiller les pistes et que l’auteur s’est appliqué à suivre ses traces? Où est le faux dans la série d’anecdotes qui s’enchainent dans ce roman où l’auteur a choisi le « je » pour nous raconter les aventures de son héroïne?

Peu importe. Tout cela se passe ailleurs. Partout. Dans des clubs tenus par des individus du monde interlope de Kansas City ou de Chicago, au célèbre Cotton Club de Harlem, qui a inspiré un film à Francis Ford Coppola, dans le Paris des surréalistes, à Auschwitz, où on croise Alma Rosé, la nièce de Mahler qui y dirigeait l’orchestre des femmes.

Valaida Snow est chaque fois aux premières loges pendant cinquante ans. Du moins le temps de ce roman historique qui s’écarte souvent de ce qu’on sait de Valaida Snow. Après tout, celle-ci n’était-elle pas une grande affabulatrice en même temps qu’une trompettiste hors du commun, ce qui lui a valu sa renommée autant que ses frasques?

Noire, la neige ne prétend pas être autre chose qu’un roman même s’il met en vedette une musicienne un peu oubliée. Et c’est sûrement pour cette raison qu’on se laisse prendre au jeu et qu’on se plait à croiser tous ceux qui ont marqué la musique comme la littérature et l’Histoire : Joséphine Baker, Duke Ellington, André Breton, Jean Cocteau, Robert Desnos, Boris Vian, Nancy Cunard, Charlie Chaplin et bien d’autres.

Noire, la neige : pour le plaisir de suivre une trompettiste de jazz au parcours des plus improbables, réinventée le temps d’un roman par un conteur qui connaît la musique et qui n’a pas froid aux yeux. Pascal Rannou s’est amusé à nous inventer une héroïne. Prenons plaisir à la suivre. Après tout, Alain Resnais l’a affirmé : La vie est un roman.

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4 commentaires »

  1. Si elle est très connue, j’avoue n’avoir jamais entendu parler de Valaida Snow…

    Comment by Anne — 6 juin 2013 @ 13:50

  2. Elle a eu son heure de gloire et a été oubliée. Pourtant, on disait d’elle qu’elle égalait presque Louis Armstrong.

    Comment by Lali — 6 juin 2013 @ 18:28

  3. Super billet. Et c’est bien dommage que tant de gens soient passés à côté d’un talent comme Valaida Snow, qui a été incontournable dans les années 30 notamment avec des titres comme The Mood That I’m In ou Until The Real Thing Comes Along, parmi des dizaines d’autres comme le célèbre My Heart Belongs To Daddy, repris à toutes les sauces jusqu’à nos jours.

    Comment by Armando — 7 juin 2013 @ 3:05

  4. My Heart Belongs To Daddy repris à toutes les sauces ?

    N’importe quoi, mon petit Armando…

    Tu peux me faire écouter My Heart Belongs To Daddy à la sauce cocktail, ou bien au ketchup ou encore à la moutarde. Tiens, ce serait bien à la moutarde. Piquante. Bien évidemment.

    Comment by Pépé pépé — 7 juin 2013 @ 18:32

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