En vos mots 894
Alors que je viens à l’instant de valider les textes que vous avez déposés sur la scène livresque de dimanche dernier, je vous propose maintenant de faire vivre à votre manière cette illustration signée Margherita Grasso.
Comme le veut l’habitude, aucun commentaire ne sera validé avant dimanche prochain. Vous avez donc plus que le temps d’écrire quelques lignes.
D’ici là, bon dimanche et bonne semaine aux envosmotistes réguliers ou ponctuels, et à celles et ceux qui les lisent.
Chaque soir, Jack regagne avec empressement son sous-marin. Le chat, qui n’aime pas l’eau mais bien les poissons, l’y accompagne fidèlement. Et des poissons, on peut dire qu’il y en a tout autour d’eux! Par milliers, nageant en vaste tourbillons. Jack n’aime pas du tout voir du poisson dans son assiette. Cela lui fait trop mal. Quand sa mère en sert au repas, il fait la grève. Elle a compris, et ne lui inflige plus jamais ce supplice.
Non, les poissons il les aime vivants. Et il se sent connecté à eux bien plus qu’aux humains. Comme si quelque chose de lui était poisson. Fonctionnait comme un poisson. Son livre préféré, qu’il ne manque jamais d’emporter, c’est ‘L’Univers des Poissons ». Une merveille. Où l’on peut voir tous les poissons imaginables et inimaginables, et apprendre comment ils vivent. Chacun a sa personnalité, ses comportements. Le chat, que Jack a bien nourri avant l’équipée, se tient tranquille. Ce qui le tient en éveil, tout comme Jack, c’est juste une saine curiosité.
Hier, Jack sous la douche a tâté sans beaucoup de surprise ses omoplates pour y constater qu’il y poussait des nageoires. Encore toutes petites. Presque microscopiques, mais bien réelles. Et déjà presque prêtes à l’emploi. Il a aussitôt vérifié celles du chat. Lui, n’en a pas encore.
Comment by anémone — 10 juin 2024 @ 14:44
Lisboa, 16 juin 2024
Ma chère B.,
Depuis presque vingt ans que, chaque dimanche, j’écris une bafouille pour une rubrique intitulée « En vos mots » qu’une amie, après une conversation, a décidé de créer, comme un point de rencontre. Je ne te mentirai pas si je te dis que depuis tout ce temps je n’ai jamais manqué un seul rendez-vous.
Cette fois-ci, elle nous propose d’écrire quelque chose à partir d’une illustration signée Margherita Grasso. Une graphiste italienne. Et, comme souvent, les images choisies me ramènent à des souvenirs. Plus ou moins heureux. Cette fois-ci, l’enfance. Encore l’enfance. Incessamment l’enfance.
Toujours est-il que lors d’un cours le professeur a eu l’idée de nous parler du sermon aux poissons de saint Antoine. De Padoue pour les Italiens et de Lisbonne pour les Portugais. Longue et passionnante histoire. Puisque tous les Portugais savent combien les Italiens ont tort et cela même si ces derniers pensent exactement le contraire. Et, cela dure depuis son décès en 1231. C’est dire.
Pour faire court, saint Antoine, las que les églises soient vides et que les hommes incrédules se montrent indignes de la parole divine, a décidé de s’adresser aux poissons. Alors, au bord de la mer, penché sur l’eau, il adresse ses homélies aux poissons. Et les poissons commencent à émerger, par centaines, pour l’écouter.
Je me souviens que cette histoire ne m’a jamais abandonné, jour et nuit, sept jours durant. Alors, lorsqu’on nous a prévenu qu’on allait visiter l’aquarium Vasco da Gama, l’enfant que j’étais a cru bien profiter de cette opportunité pour lire, heureux et fier, une histoire à ces pauvres poissons.
Je ne saurais pas te dire quel souvenir ils ont gardé de ma lecture, mais moi j’en conserve un souvenir impérissable. Souvenir que j’avais d’ailleurs retrouvé lors de la lecture du livre de Patrice Lessard, Le serment aux poissons, qui raconte les déambulations d’Antoine dans les rues de Lisbonne, alors que sa bien-aimée est rentrée à Montréal.
Ah Montréal. Un jour je t’en parlerai.
Je t’embrasse.
Armando
Comment by Armando — 12 juin 2024 @ 1:03