En vos mots 802
Alors que je viens à l’instant de valider les textes déposés sur la toile de dimanche dernier, que je vous invite d’ailleurs à lire, je vous propose cette semaine de faire vivre ce tableau de l’artiste Scipione Vannutelli.
Comme le veut l’habitude, aucun commentaire ne sera validé avant dimanche prochain, ce qui vous laisse plus que le temps d’écrire quelques lignes. En vers ou en prose. Il n’y a pas de règles au pays de Lali.
D’ici là, profitez bien de ce début du mois de septembre, encore clément, et retrouvons-nous ici dimanche prochain pour la suite.
Pour marquer la réussite de ma dernière année scolaire, mon vieux professeur d’histoire m’a offert un vieux livre de poésies, dûment dédicacé de sa belle écriture. Je n’ai jamais pu oublier son sourire, sa chaleur et combien ses mots m’ont accompagné tout au long de mon existence.
Les contraintes de l’existence ont fait que j’ai dû vendre ce livre à un antiquaire. Le chômage. La faim. La vie, quoi…
Quelques années plus tard, je suis retourné chez l’antiquaire pour reprendre ce bien. Le bouquin n’y était plus. Il avait été vendu à un certain Paul, un agent bancaire, qui cherchait un cadeau particulier pour sa fille qui terminait ses études en littérature.
Après avoir convaincu le directeur de la banque du bien fondé de ma démarche, il m’a confié que Paul était parti depuis longtemps, quelque partdansà l’arrière-pays, vivre une retraite heureuse.
Quand j’ai retrouvé la trace de Paul, il n’était plus de ce monde. Heureusement, une voisine m’a informé que sa fille Laure était devenue chercheuse en linguistique dans une université réputée pour la qualité de son enseignement.
Manifestement, elle m’attendait. Elle était là. Debout. Et elle avait ce qui, dans ma jeunesse, m’avait été offert, entre les mains.
– Armando, c’est bien ça?… L’antiquaire m’a parlé de votre histoire. Ma chère et tendre voisine aussi. On dirait que vous avez fait du chemin pour arriver jusqu’à moi. Vous souvenez-vous d’un poème en particulier?…
– Il me semble qu’il y avait un poème de Maria Beatriz Serpa Branco, qui disait quelque chose comme :
« Ce garçon clôturé
avait le destin d’un oiseau
d’avoir une maison dans les arbres
et de voir les toits d’en haut ».
Malheureusement je n’ai aucun souvenir de la suite….
C’est alors que Laure m’a tendu le livre et que, de sa voix musicale, a poursuivi :
« ce garçon seulement d’un oiseau
n’a jamais levé son vol au large
on ne lui a jamais ouvert les fenêtres
et la ville lui a volé
son espace d’étoiles
ce garçon si pauvre
en connaissances accumulées
ce garçon si sage
si riche en aurores
déshérité
et mal aimé
ce garçon oiseau
a un destin enfermé »
Puis, habillée d’un sourire tendre, elle m’a lancé : « Je connais ce livre par cœur. Je l’ai gardé pour vous. Il vous revient d’en prendre soin. Je sais, désormais, que vous le ferez… »
Comment by Armando — 5 septembre 2022 @ 2:54
Du livre posé sur le coffre
Elle lit parfois un passage.
Transportée par ce qu’il lui offre.
A chaque fois un beau voyage.
Elle prend une page au hasard,
Et s’évade en quelques lignes
Qui l’emmènent pour un grand départ
Au gré des symboles et signes.
Elle embarque sur un paquebot
Accompagnée de ses malles,
Franchissant les grands espaces d’eau
Jusqu’aux aurores boréales.
Quand elle repose le livre
Sa vie a changé de registre.
Elle peut se remettre à vivre
Dans un quotidien bien moins triste.
Comment by anémone — 10 septembre 2022 @ 3:42