Lali

2 janvier 2012

Anecdotes de réviseure 15

Filed under: Anecdotes de réviseure,Couleurs et textures — Lali @ 14:29

J’ai longtemps cru et il m’arrive encore de croire que le métier d’éditeur est noble et qu’il mérite même un certain respect. Même s’il y a de nombreux individus qui se font appeler éditeurs sans avoir la passion qu’il faut pour exercer la profession et sans posséder les qualités nécessaires à leur tâche.

Comment peut-on, dites-moi, laisser des chefs de production bâcler leur travail? Comment peut-on confier la révision et la mise en page au premier venu (ou à ce qui semble l’être)? Dites-moi. Je ne comprends pas. Et je reste chaque fois pantoise quand je constate qu’un écrivain, qu’il en soit a son trentième ou à son premier livre, subisse les contrecoups du travail non fait de son propre éditeur.

J’exagère? Je ne crois pas. J’en suis à la page 19 d’un roman qui n’a sûrement pas été révisé puisque j’y trouve des étrangetés comme aupa-ravant… et une absente flagrante d’espaces insécables, ce qui nous donne des guillemets ouverts en bouts de ligne.

J’ai longtemps cru que la passion du métier d’éditeur se reflétait dans ses livres. Je sais maintenant que son manque de passion s’y reflète aussi.

*toile de José Sobral de Almada Negreiros

Ce que mots vous inspirent 570

Filed under: Ce que mots vous inspirent,Couleurs et textures — Lali @ 8:00

L’artiste est celui qui voit plus haut, plus grand, plus clair que les autres hommes. (Antoine Auguste Préault)

*toile de Mikhail Zichy

1 janvier 2012

Les vers de Nâzim 1

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

Pour commencer l’année, la lectrice de l’artiste Heidi Berger a choisi Il neige dans la nuit et autres poèmes de Nâzim Hikmet, poète turc exilé à qui le Conseil mondial de la paix a décerné en 1955 le Prix international de la paix. Un recueil dont la préface de Claude Roy éclaire l’œuvre de cet homme qui n’a jamais cessé de se battre au nom de la liberté, et dont la lectrice de ce soir a extrait ces vers :

Je ne ressens pas la nostalgie des jours passés
— sauf celle d’une nuit d’été —
et même l’ultime éclat bleu de mes yeux
te dira la bonne nouvelle
des jours à venir.

En vos mots 247

Filed under: Couleurs et textures,En vos mots — Lali @ 8:00

C’est une des geishas de l’artiste californienne Miriam Slater que je vous invite à dévoiler en vos mots en ce début d’année. En vers.En prose. En toute simplicité. Pour le plaisir de vous plier à l’exercice. Pour la centième fois ou la première. Parce qu’il n’est jamais trop tard pour tenter une nouvelle expérience.

Puisse cette toile inspirer de nombreux textes et donner le goût à de nouveaux envosmotistes à se joindre à ceux qui viennent, selon l’inspiration, déposer quelques lignes sur les toiles qui vous sont offertes dimanche après dimanche depuis près de cinq ans.

Bonne année à tous les envosmotistes passés, présents et futurs, ainsi qu’à ceux qui les lisent.

31 décembre 2011

Les vers de Cécile 8

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

Ma maison est assise au vent
Dans une plaine sombre et nue
Comme un tombeau pour un vivant
Où s’agite ma chair menue.

Les longs brouillards viennent frôler
Au soir ma porte solitaire,
Et je ne sais rien de la terre
Que ma tristesse d’exilé.

Cécile Sauvage, Œuvres complètes

*choix de la lectrice de Marina Richterova

Comme vous le ferez peut-être

Filed under: Couleurs et textures — Lali @ 8:00

Des mots. Il en faut si peu pour écrire une histoire, pour créer une atmosphère, pour dessiner des personnages. Des mots. Ceux qu’elle va déposer, comme vous le ferez peut-être, sur la toile de la semaine.

*toile du peintre belge Alfred Stevens

Dernières heures

Filed under: États d'âme,Couleurs et textures — Lali @ 6:01

Dernières heures du dernier jour d’une année qui tire sa révérence. Qu’en retenir sinon un bouquet de souvenirs épars? Une plage du Massachusetts, un parc montréalais dont on ne se lassera jamais, des doigts qui caressent un clavier, des mots qui bouleversent, des repas qui s’étirent, des rencontres qui font le sel de la vie…

Dernières heures avant 2012. Penchée sur un livre. Le bol de café pas loin.
Rituel d’une vie qui donne aux souvenirs une place de choix.

*toile de Kay Ritter

30 décembre 2011

Les vers de Cécile 7

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

L’enchantement lunaire endormant la vallée
Et le jour s’éloignant sur la mer nivelée
Comme une barque d’or nombreuse d’avirons,
J’ai rassemblé, d’un mot hâtif, mes agneaux ronds,
Mes brebis et mes boucs devenus taciturnes
Et j’ai pris le chemin des chaumières nocturnes.
Que l’instant était doux dans le tranquille soir!
Sur l’eau des rayons bleus étant venus s’asseoir
Paraissaient des sentiers tracés pour une fée
Et parfois se plissaient d’une ablette apeurée.
Le troupeau me suivait, clocheteur et bêlant.
Je tenais dans mes bras un petit agneau blanc
Qui, n’ayant que trois jours, tremblait sur ses pieds roses
Et restait en arrière à s’étonner des choses.
Le silence était plein d’incertaines rumeurs,
Des guêpes agrafaient encor le sein des fleurs,
Le ciel était lilas comme un velours de pêche.
Des paysans rentraient portant au dos leur bêche
D’argent qui miroitait sous un dernier rayon,
Et des paniers d’osier sentant l’herbe et l’oignon.
Les champs vibraient encor du jeu des sauterelles.
Je marchais. L’agneau gras pesait à mes bras frêles.
Je ne sais quel regret me mit les yeux en pleurs
Ni quel émoi me vint de ce cœur sur mon cœur,
Mais soudain j’ai senti que mon âme était seule.
La lune sur les blés roulait sa belle meule;
Par un même destin leurs jours étant liés,
Mes brebis cheminaient auprès de leurs béliers;
Les roses défaillant répandaient leur ceinture
Et l’ombre peu à peu devenait plus obscure.

Cécile Sauvage, Œuvres complètes

*choix de la lectrice de Raymond Rochette

Ce que mots vous inspirent 569

Filed under: Ce que mots vous inspirent,Couleurs et textures — Lali @ 8:00

Ce qui ne fait pas de bruit n’intéresse personne. (Pierre Karch)

*aquarelle de Christiane C. Wolff

29 décembre 2011

Les vers de Cécile 6

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

Voilà que je me sens plus proche encor des choses.
Je sais quel long travail tient l’ovaire des roses,
Comment la sauterelle au creux des rochers bleus
Appelle le soleil pour caresser ses neufs
Et pourquoi l’araignée, en exprimant sa moelle,
Protège ses petits d’un boursicot de toile.
Je sais quels yeux la biche arrête sur son faon,
Tellement notre esprit s’éclaire avec l’enfant;
Je sais quels orgueils fous se cramponnent aux ventres,
Dans les nids, les sillons, les océans, les antres,
Quels sourds enfantements déchirent les terrains,
Quelles clameurs de sang s’élèvent des ravins.
Nous avons le regard des chattes en gésine
Quand le flux maternel nous gonfle la poitrine,
Quand l’embryon mutin bouge dans son étui
Comme un nouveau soleil sur qui pèse la nuit.
Nos seins lourds et féconds comme la grappe mûre
Offrent leur doux breuvage à toute la nature
Et notre obscur penchant voudrait verser son lait
À l’abeille, à la fleur, au ver, à l’agnelet.
Plaine grosse de sève et d’ardeurs printanières,
Écume salivant le désir des rivières,
Prunier croulant de miel, pesantes fenaisons,
Geste courbe et puissant des vertes frondaisons,
J’épouse la santé de votre âme charnelle
À présent que je vais forte comme Cybèle,
Que je suis le figuier qui pousse ses figons,
Qu’ayant connu l’essor hésitant du bourgeon
Et déployé la fleur où la guêpe vient boire,
Je m’achemine au fruit dans l’ampleur de sa gloire.
Le monde n’a plus rien de trop profond pour moi,
J’ai démêlé le sens des heures et des mois,
Et ma main qui s’arrête aux fentes des murailles
Sent dans le flanc du roc palpiter des entrailles.
Je n’aurais pas voulu, desséchant sur mon pied,
Être l’arbre stérile au tronc atrophié
Où l’abeille maçonne aurait creusé sa chambre,
Où quelque cep noueux gonflant sa grappe d’ambre
Aurait mis sur ma branche un air pâlot d’été
Sans que je participe à sa divinité.
Comme la riche nuit entre ses légers voiles
Voit dans son tablier affluer les étoiles,
Comme le long ruisseau abondant de poissons,
Je brasse en épis drus les humaines moissons.
Hommes, vous êtes tous mes fils, hommes, vous êtes
La chair que j’ai pétrie autour de vos squelettes.
Je sais les plis secrets de vos cœurs, votre front
Cherche pour y dormir mon auguste giron,
Et ma main pour flatter vos douleurs éternelles
Contient tous les nectars des sources maternelles.

Cécile Sauvage, Œuvres complètes

*choix de la lectrice de Christian Rohlfs

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