En vos mots 296
C’est le lecteur signé Laurence Fellows, un illustrateur de mode masculine des années 40 et 50 qui va vous tenir compagnie cette semaine et, j’ose l’espérer, vous inspirer.
Comme le veut l’habitude, aucun commentaire ne sera publié avant dimanche prochain. Mais, bonne nouvelle : ceux sur la toile de dimanche dernier viennent tout juste d’être validés. Prenez le temps de les lire. Chacun de ces textes mérite qu’on s’y arrête.
Sur ce, bon dimanche à tous!
« Police!… Ouvrez! » Les coups portés à la porte d’entrée étaient bruyants. Énergiques. Comme si on était pressé d’arrêter un dangereux criminel. Et les voix féroces : « Police!… Ouvrez immédiatement, sinon on enfonce la porte! »
À vrai dire, je les attendais. Sereinement. Et sans crainte.
Il m’est venu à l’esprit le sourire de M.
Faut dire que notre rencontre à l’hôpital avait été singulière. Unique. Tranchante comme une guillotine aiguisée.
« Dites-moi la vérité docteur!… m’avait-il lancé le regard fixant le mien. Je ne veux que la vérité, docteur!…
– La vérité, vous la connaissez déjà, lui ai-je répondu sans détourner mon regard du sien.
Après un long silence, le fouet des mots : « Combien de temps encore?…
– Je ne sais pas. Quelques jours. Peut-être quelques semaines. Des mois…
– Et la souffrance docteur?…
La souffrance?… Des souffrances. Les souffrances morales… Les souffrances physiques… et puis toutes celles de la solitude, de la perte de repères, de l’image de soi qui se détériore et devient trop lourde à porter. « De quelles souffrances voulez-vous qu’on parle?… »
D’un regard profond, il m’a lancé, comme une gifle en plein visage : « Mais vous savez comment arrêter tout cela, n’est-ce pas docteur?… Ne me mentez pas. Je sais que vous le savez… Je vous signe ce que vous voulez… Vous savez… Vous n’aurez pas de soucis…
– Je ne le ferai pas. Vous savez que je ne pourrai pas le faire.
– Oui je sais. Votre fameuse déontologie de merde. Le sacrosaint serment d’Hippocrate. Je connais. La belle excuse, docteur. La belle excuse, je vous dis. Et ma dignité?… Vous en faites quoi de ma dignité?…
Nous sommes restés là. Assis. L’un en face de l’autre. Les yeux dans les yeux. Accrochés à un silence interminable. Un silence que j’ai interrompu : « Je vous comprends. Je ne vous laisserai pas tomber. Je vous le promets. Mais avant, parlez-moi un peu de vous. Je ne sais rien de vous. »
D’un sourire qui m’a rappelé celui de mon père à l’heure de la délivrance, il m’a tendu un épais carnet de notes. « Tout est là docteur. Ma vie. Mes secrets. Mes larmes. Mes insomnies. Mon histoire. Mes solitudes. Tout. Vraiment tout. Prenez-en le plus grand soin docteur. »
Comment by Armando — 14 décembre 2012 @ 4:02
Qui se cache derrière ce personnage?
Serait-ce un grand solitaire, soucieux de son image de dandy, dont la jauge est le regard des autres?
Qui se cache derrière ce teint parfait, ce costume impeccable, cette taille idéale, ce maintien irréprochable dans ce décor vintage?
Chercherait-il dans les livres et l’alcool la clé de son angoisse existentielle?
Non, ce n’est que le mannequin d’une publicité de mode masculine dans le monde superficiel des sixties, rien de plus!
Pourtant…qu’est-ce qui se cache derrière ce personnage au-dessus du foyer de cheminée?
…Un miroir…
Comment by Flairjoy — 14 décembre 2012 @ 6:22
Que le grand cric me croque si je craque
Gentleman,
crack en bourse, coq en pâte, le pantalon pied de poule, inspirant, transpirant d’élégance, tu spécules sur les bulles de ton vermouth.
Maniéré, aux quintessences du bon goût, de la coupe pleine – cric-crac, jour après jour, tu croques les croquants. Tes chemises sur-mesure battent le tempo, et jamais ne dépriment ni ne crisent.
Ton blazer trop cintré, à l’épaule s’élargit en carrure athlétique, en patron adapté, liquidant toutes tes positions.
Et craque l’allumette… Ha ce destin ! Seulement lui ! Il est possible qu’à la canne, qu’au chapeau, il t’aille toujours comme un gant,
et qu’aux dominos du jeudi noir :
soit fluctue, s’effondrant,
soit ne bouge d’un pouce, au solide.
Mais, Gentleman,
ta bulle déchue a bien chu, dans l’odeur âcre du vermouth…
Comment by Cavalier — 16 décembre 2012 @ 4:31
« LES MODES RENDENT LES RICHES PAUVRES » PROV. FR.
En lisant attentif les mots glissés sur les toiles de Lali, par-dessus les épaules de Cavalier, j’ai tout de suite reconnu ici les pattes d’un ourson cabotin.
Ça alors! Quelle coïncidence! Comme dans la « vraie vie », quoiqueeee…;)
Ah faut que je vous prévienne, cet homme au costume de miel, de sucreries et d’amour n’est pas un dandy!
Au contraire ce plombier pose ici pour un magazine de mode juste pour gagner quelques sous.
Et puis ce qu’il semble lire si sérieusement ce sont juste quelques « oursonnades » tout droit sorties de nos petits cerveaux de peluche.
Non c’est un plombier tendre, romantique et charmant à sa façon, totalement dénué de snobisme.
Ouf, heureusement que j’ai pu dissiper cette méprise avant que la méprise s’installe.
Bisous à Puff.
Comment by Ffup de Bretagne — 16 décembre 2012 @ 5:28
Simplement, vous dire merci à tous, pour le plaisir renouvelé à lire, voir relire vos En vos mots si riches en réflexion, tendresse ou humour. Comme tu le dis si bien Lali » Chacun de ces textes mérite qu’on s’y arrête »
Près de vous par la pensée… Bonne semaine. Chaleureusement.
Comment by Chantal — 17 décembre 2012 @ 6:09
Flairjoy et Puff = même combat;)
Mais les autres font cavalier seul je pense.
Par contre j’accepte avec plaisir vos bisous de Bretagne 🙂
Comment by Puff — 17 décembre 2012 @ 6:28
Tiens… c’est drôle. J’ai connu un Ffup qui habitait au cœur de Paris, juste a côté de Montreuil, et qui avait le pied marin mais ne savait pas nager, et qui m’a confié vouloir s’exiler en Bretagne.
Serait-ce un hasard du destin?…
Comment by Pépé — 17 décembre 2012 @ 8:45
@Armando > Quelle belle histoire ! Dure mais belle. On entend les silences…
@Flairjoy > J’aime beaucoup, oui, et s’il n’y avait de nombreux kilomètre de distance entre les auteurs, ou, si Lali ne publiait dès potron-minet après tous les postages de textes, je dirais que la transmission de pensée n’existe pas. Le texte de Flairjoy et de Ffup de Bretagne sont des textes miroir, au tain parfait, et ils sont bien posés sur le foyer derrière le personnage, mannequin plombier de son état… 😉
Comment by Cavalier — 17 décembre 2012 @ 17:29