En vos mots 287
Elle a étalé ses dictionnaires et sorti sa plus jolie plume afin de répondre à mon invitation. Mais pas besoin de faire tant de frais! Quelques mots qui vous appartiennent seront suffisants pour donner vie à la toile de James Bolivar Manson déposée à votre intention.
Une seule règle : déposer votre texte avant dimanche prochain, 8 h, heure de Montréal.
Toutes les conditions étaient réunies. La température de la pièce était juste assez chaude, pas trop froide. Elle venait de prendre son thé favori, assorti des biscuits au gingembre qu’elle aimait tant. Sa fidèle lampe lui fournissait un éclairage confortable, et l’ensemble des couleurs alentours lui apportaient une énergie calme, rassurante.
Elle chérissait avant tout le bleu. Son bureau en témoignait avec harmonie. Même si elle s’était plutôt habillée de mauve. Pour les vêtements d’ailleurs, elle préférait curieusement d’autres teintes. Comme si trop de bleu pouvait nuire au bleu. De même pour les murs ou la tenture, pour lesquels elle avait choisi du vert et du violet très clair. Elle portait peu de bijoux, mais eux aussi étaient rarement bleus. Elle affectionnait pour eux le vert également, ou le turquoise, qui était tout de même un mélange de bleu et de vert.
A portée de main, les dictionnaires. Dans sa tête, un plan assez précis de ce qu’elle voulait rédiger. Devant elle, fidèle lui aussi, l’encrier d’un profond outremer. Sa plume déjà courait sur le papier comme un frais ruisseau bleu. Voir se dérouler son écriture lui procurait toujours une considérable satisfaction. Elle ne connaissait pas l’angoisse de la page blanche. Elle savait s’entourer des objets amis nécessaires à renforcer sa confiance en sa capacité d’écrire. Et pour couronner cette sensation de bien-être, les fleurs qu’elle avait choisies pour leur couleur complémentaire au bleu et pour leur parfum léger et discret, lui offraient au seuil de l’hiver un alerte goût de printemps.
Comment by Anémone — 7 octobre 2012 @ 3:44
Et pendant que dans son atelier, Olivier poursuivait son rêve d’inaccessible beauté, et pendant que sous son égide, les apprentis assemblaient la couleur et les textures, les pigments et les pâtes, l’épouse s’astreignait à la couture, à la tenue du ménage, à la cuisine, à l’éducation des six enfants, au bonheur des autres, au devoir joyeux, mais…
Mais dans un coin de son bureau, elle ouvrait un cahier, et pas un cahier de comptabilité, puis, elle égrenait, au long des jours, des mois des années, la chronique de la Maison Rose, des tante, parents, belle-mère, frères et cousins.
C’est un peu ainsi que j’imagine Brigitte, l’héroïne de Berthe Bernage, une plume qui me fascine encore toujours, bien que je ne partage aucune de ses idées.
Mais alors là, aucune.
Comment by Pivoine — 8 octobre 2012 @ 14:35
VIVE LA RETRAITE
Il est sept heures trente.
Sa plume est chargée d’encre Parker.
Les trois pages du matin de son cahier Canada l’attendent.
Larousse et Becherel lui servent de bouées de sauvetage.
Elle dépose sa Timex sur son bureau et trois caramels Werther.
Depuis le premier jour de sa retraite elle écrit tout ce qu’elle pense et n’ose pas dire.
Elle y raconte ses violences, ses haines, ses jalousies, ses peines, ses colères.
Il est neuf heures.
Elle referme le cahier, remet sa montre, replace la mèche qui s’est égarée sur son front, se lève, va dans la chambre, regarde ronfler cet homme dont elle a été un jour follement amoureuse.
Elle prend son manteau, son sac à main et part rejoindre ses amies au café Tim.
Elles sont veuves, divorcées ou célibataires et elles racontent à quel point elles sont libres et heureuses.
Avant de partir, elle achète un café et une demi-douzaine de beignes qu’elle dévore en vitesse avant d’entrer chez elle.
Elle ouvre la porte, prend le courrier et ramasse avec essoufflement le journal.
Dans un coin du salon,en pyjama,la barbe longue,il attend son Tim-café devant l’écran d’ordinateur où disparaissent subrepticement de jolies filles aux gros nichons.
Pourtant… elle aussi a de gros nichons…
Comment by Armèle Labelle — 12 octobre 2012 @ 16:45
Parfums de silences mélangés
La mer danse les retrouvailles
Un fado dans mes pensées
Et le cœur dans une tenaille
J’esquisse l’écume d’un sourire
La tristesse est si gaie quelquefois
Que les mots ne peuvent pas dire
Ces larmes qu’on pleure de joie
Comment by Armando — 14 octobre 2012 @ 6:14