En vos mots 913
Décidément, les semaines passent bien trop vite. Et comme j’aimerais trouver le temps de lire à mon aise, comme le fait le lecteur illustré par Israel Barron. Bientôt, j’espère…
Pour l’heure, je vous le confie. À vous de nous raconter en vos mots ce qu’il lit ou ce qui se dégage de cette scène livresque. Prenez votre temps, aucun commentaire ne sera validé avant dimanche prochain. Et pensez à lire les textes déposés sur l’illustration de dimanche dernier.
D’ici là, bon dimanche et bonne semaine à tous les envosmotistes et à celles et ceux qui les lisent.
François est en vacances. Mais il n’ira pas jouer avec ses petits camarades. Dans le confinement de sa chambre, où il se rétablit d’une petite maladie, heureusement il a ses amis: son chien Fidèle, et ses livres.
Allongé sur le tapis, comme sur un tapis volant, il parcourt alors le monde, dont le tapis lui-même est un résumé. Il en a vu de belles choses, depuis le temps où il sait lire! Plus belles que s’il jouait avec ses copains. Il ne peut en parler avec les autres enfants. Ni avec ses parents. Cela lui manque un peu. Mais pas tant que cela, puisque dans ses lectures il rencontre plein d’êtres merveilleux avec qui entrer en contact. Ils lui racontent leurs vies, souvent si différentes de la sienne. Ils échangent sur leurs joies, leurs problèmes. Ses camarades de classe ne font pas cela. Ils ne connaissent rien du monde. Ils ne savent que ce qu’on leur en montre à la télévision. Et ils croient tout savoir.
Seul Fidèle, son chien aimé, peut le suivre dans ces aventures. L’oreille toujours ouverte, le coeur toujours curieux de ce que vit et ressent son petit compagnon humain. Tous deux sans cesse ravis de leurs nouvelles découvertes, et se tenant chaud, dans la petite chambre.
Comment by anémone — 24 octobre 2024 @ 4:17
Lisbonne, 27 octobre 2024
Ma chère B.
il me viennent souvent de pensés qui me poursuivent comme une ombre. Elles ne sont ni tristes ni joyeuses. Encore moins de regrets. Seulement des pensées éparses. Presque orphelines.
J’arrive à un âge où le temps à venir devrait être apaisé. Et pourtant. Comment l’être quand les gens qu’on aime ne le sont pas vraiment. Avec l’âge viennent nos silences mais ils ne nous épargnent pas de penser à nos vies si empressés et éphémères. Bien au contraire.
Et, pour la plupart d’entre nous on se dit qu’on ferait tout en mieux. Beaucoup mieux. Plus tolérants. Plus aimants. Faire mieux tout ce que nous avons moins bien fait. Alors qu’en réalité on le ferait autrement. Sans doute. Mais mieux?… on ne le saura jamais.
Quoi qu’il advienne les lignes des jours a vivre je ne voudrais pas faire autrement qu’aimer tous ceux qui font de moi un être vivant. Même si je dois traverser les frontières pour me noyer dans la tendresse de leur regard. Leur dire que je les aime. Leur dire que les voir sourire et les entendre respirer me suffisent pour me sentir vivant. Util et heureux.
Leur dire que mes chagrins sont moins lourds quand je pense à eux. Et que le souvenir des moments passés sont comme des étoiles qui brillent dans mes nuits.
Puisque leur dire simplement que je les aime est si peu. Tellement peu. Qu’il me semble mieux de les aimer sans perdre ce qui nous reste de temps à leur dire.
Je t’embrasse.
A.
Comment by Armando — 26 octobre 2024 @ 10:03
Enfant, je trompais ma solitude dans les mots de Stevenson ou de Twain. Mon monde était si petit et je rêvais de l’île au Trésor ou du Mississippi où il serait doux d’être libre et intrépide.
Et j’entendais mon père me dire que je ne servais à rien. Rêveur, ce n’était pas un métier.
Enfant, je m’en allais au centre de la terre et je suivais Lidenbrock, dans l’ombre de ses pas. Sans bruit. Et je revenais de temps en temps pour entendre mon père crier que je ne serais jamais rien.
Enfant, j’aimais déjà Kipling et je parlais aux serpents comme mon ami Mowgli ou je m’en allais dans le froid de l’Alaska, avec mon compagnon Buck et on vivait des heures heureuses, pleines d’amitié et d’aventures, comme un appel de la forêt.
Et mon père me regardait en se demandant ce qu’il allait pouvoir faire de moi, qui n’étais qu’un bon à rien.
Et j’ai lu bien d’autres choses. Un conte de deux cités et Le Nom de la rose; Le vieil homme et la mer, Les hauts de Hurlevent et L’étranger. Il m’est même arrivé, et je l’avoue sans aucune honte, à l’âge des grands mystères, de m’attarder sur Histoire d’O, L’amant de Lady Chatterley ou encore dans les mots sans détour d’Anaïs Nin.
Le temps a passé depuis. Les nuits mangent les heures jusqu’aux nouveaux matins. De Uguay a d’Ormesson, de Nelligan a Munro. Juste des histoires et quelques rêves. La solitude s’évapore dans l’univers des mots.
Et dans un coin de mon passé, je l’entends encore d’une voix fatigué presque inaudible. Je murmure quelques mots en silence. Dans l’espoir qu’un jour ou l’autre il les entende. Et se taise.
Comment by AR — 27 octobre 2024 @ 1:31