Escalier 3
Shéhérazade parle
Pour que du fond de mon mourir
Je vienne à pas précipités,
Que de portes il faut ouvrir
Et que de rideaux écarter!
Que de silence à remonter
Pour changer mes étoiles noires
En votre vivante clarté,
Pour que du fond de mon espoir
Je vienne à pas de vérité!
Après avoir vécu de contes
Plus véridiques que l’histoire
Que d’une voix qui vous affronte,
Ma mémoire vous donne à boire!
Et ne soyez pas étonnés,
Moi qui étais si éloignée,
Si je suis là de plus en plus,
Si vous croyez ce que j’ai cru.
Veuille m’aider, ô poésie,
À franchir le cercle de vie,
Toi qui rassembles tous les temps
Dans ce qu’ils ont de ressemblant,
Les visages n’ont pas changé
Et nul ne me semble étranger.
Écoutez donc, mes nouveaux frères,
Comment les choses se passèrent,
Comment abordent le présent
Ces contes de la nuit des temps.
Jules Supervielle, Escalier
*choix de la lectrice de Claartje van der Linden