Un embrouillamini qui s’embrouille
Ceux qui avaient aimé Traces, le premier roman d’Anna Raymonde Gazaille, notre recrue de février 2014, seront ravis de trouver en librairie cet automne Déni, un autre roman policier mettant en scène l’inspecteur Paul Morel et son équipe, avec qui les lecteurs ont fait connaissance dans Traces.
Mais attention! Le deuxième roman d’Anna Raymonde Gazaille n’est pas tricoté aussi serré que le premier et se perd souvent dans les détails et les répétitions, ce qui nous donne l’impression de tourner en rond. C’est d’autant plus désolant que l’auteure a fait une recherche minutieuse sur les mœurs musulmanes et sur le quartier montréalais de Parc-Extension, le quartier le plus multiethnique de la ville, comptant à lui seul plus de 75 communautés.
Deux histoires sont ici menées de front, celle d’une Russe qui a déserté le domicile conjugal, situation qui fait d’elle une illégale dans ce pays qui se voulait être celui de sa libération, et celle entourant le meurtre d’une adolescente d’origine pakistanaise, retrouvée pendue par son hijab au tremplin de la piscine de son quartier, dénominateur commun entre l’adolescente et la jeune Russe.
Mais, à l’heure où s’ouvre cette nouvelle enquête qui va prendre des proportions inimaginables au départ et entraîner d’autres morts, Paul Morel et son équipe n’ont aucune idée de ce qui tient ce quartier, des liens de solidarité ou d’inimitié entre ceux qui y vivent (ou survivent), des guerres de pouvoir qui y sévissent, et encore moins des particularités propres aux communautés ethniques qui y ont élu domicile.
Il faudra donc à l’équipe — dont certains membres sont aux prises avec des problèmes personnels qu’il est inutile de connaître et qui ne font que faire piétiner inutilement le lecteur — du sang-froid, de l’énergie et un grand sens du détail et de la débrouillardise pour démêler tous les fils de cette histoire où il est question de crime d’honneur, de guerre de gangs, de drogue, de violence conjugale et du climat dans lequel vivent certains nouveaux arrivants.
C’est à cause de cet embrouillamini qu’on tente de défaire en allant dans toutes les directions parce qu’il faut faire appel à toutes sortes de spécialistes, que le lecteur finit par s’essouffler en plus d’être agacé par deux ou trois coïncidences qui servent bien le roman, soit, entre autres, le fait que la conjointe de Morel ait son atelier de danse à deux pas des lieux du crime.
Mais que ceux qui ont aimé Traces soient rassurés. Anna Raymonde Gazaille réussit à boucler le tout. L’équipe d’enquêteurs mettra la main au collet du ou des coupables de ce meurtre sordide lié à ceux qui ont suivi. Mais il faudra emprunter tellement de chemins de traverse pour y arriver qu’il est possible que certains abandonnent avant la fin, ce qui donne à penser que Déni peut-être été écrit trop vite afin qu’il paraisse dans la foulée du premier qui avait beaucoup plu à la critique. Mais il ne faut jamais oublier que « chi va piano, va sano ».