Les vers de Jonathan 3
je ne dormirai plus
j’écouterai
ta respiration
s’enrouler
autour de mes côtes
petites crevasses d’étreintes
Jonathan Lamy, Je t’en prie
*choix de la lectrice de Christian Munch
je ne dormirai plus
j’écouterai
ta respiration
s’enrouler
autour de mes côtes
petites crevasses d’étreintes
Jonathan Lamy, Je t’en prie
*choix de la lectrice de Christian Munch
Valaida Snow a eu une vie tellement rocambolesque que les rares biographes qui se sont intéressés à elle ont eu du mal à démêler le vrai du faux tant celle-ci s’est appliquée à enjoliver ou à noircir certains épisodes de sa vie au profit du public à qui elle s’adressait, tant et si bien que la trompettiste, comédienne et chanteuse métisse avait tout pour devenir un personnage de roman. C’est ce à quoi s’est employé Pascal Rannou dans Noire, la neige, qui est à la fois le portrait d’une époque, une histoire du jazz et celle d’une femme que (presque) rien n’a arrêtée au cours d’une vie qu’il a beaucoup romancée afin que Valaida Snow se trouve mêlée à tous les événements importants de l’histoire des États-Unis comme du reste du monde.
Née en 1902 à Chattanooga (Tennessee), ville immortalisée par Glenn Miller, Valaida Snow n’est pas restée longtemps dans son Sud natal, appelée ailleurs par la musique ou pour fuir la ségrégation raciale. Chicago, New York, Paris ne sont là que quelques-unes des nombreuses villes où elle a posé ses valises, en compagnie des siens ou seule, alors qu’elle tentait de se tailler sa place parmi les grands de la musique, aux côtés de Louis Armstrong et de Django Reinhardt.
Où est le vrai dans ce roman inspiré par Valaida Snow? Faut-il vraiment le chercher alors que celle dont il est question s’est amusée toute sa vie à brouiller les pistes et que l’auteur s’est appliqué à suivre ses traces? Où est le faux dans la série d’anecdotes qui s’enchainent dans ce roman où l’auteur a choisi le « je » pour nous raconter les aventures de son héroïne?
Peu importe. Tout cela se passe ailleurs. Partout. Dans des clubs tenus par des individus du monde interlope de Kansas City ou de Chicago, au célèbre Cotton Club de Harlem, qui a inspiré un film à Francis Ford Coppola, dans le Paris des surréalistes, à Auschwitz, où on croise Alma Rosé, la nièce de Mahler qui y dirigeait l’orchestre des femmes.
Valaida Snow est chaque fois aux premières loges pendant cinquante ans. Du moins le temps de ce roman historique qui s’écarte souvent de ce qu’on sait de Valaida Snow. Après tout, celle-ci n’était-elle pas une grande affabulatrice en même temps qu’une trompettiste hors du commun, ce qui lui a valu sa renommée autant que ses frasques?
Noire, la neige ne prétend pas être autre chose qu’un roman même s’il met en vedette une musicienne un peu oubliée. Et c’est sûrement pour cette raison qu’on se laisse prendre au jeu et qu’on se plait à croiser tous ceux qui ont marqué la musique comme la littérature et l’Histoire : Joséphine Baker, Duke Ellington, André Breton, Jean Cocteau, Robert Desnos, Boris Vian, Nancy Cunard, Charlie Chaplin et bien d’autres.
Noire, la neige : pour le plaisir de suivre une trompettiste de jazz au parcours des plus improbables, réinventée le temps d’un roman par un conteur qui connaît la musique et qui n’a pas froid aux yeux. Pascal Rannou s’est amusé à nous inventer une héroïne. Prenons plaisir à la suivre. Après tout, Alain Resnais l’a affirmé : La vie est un roman.
Titre pour le Challenge Des notes et des mots
La nature du vrai transparaît d’abord dans le soin qu’il met à se dérober. (Claude Lévi-Strauss)
*toile d’Arthur Bowen Davies