« La vérité, c’est que je ne veux pas finir cette histoire. Je voudrais suspendre éternellement ce moment où les quatre hommes dans la crypte décident de ne pas se résigner et de creuser un tunnel », écrit l’auteur dans les dernières pages de HHhH.
Et probablement Laurent Binet ne voulait-il pas en finir avec son roman mettant en scène Reinhard Heydrich dit HHhH (le cerveau d’Himmler s’appelle Heydrich) pour l’avoir ainsi étiré à outrance. En effet, le roman fait près de 450 pages. Ce qui est beaucoup. Surtout quand il y a des longueurs et des répétitions. Quand on tourne en rond ou qu’on en a l’impression. Quand ça piétine, autant pour l’auteur qui n’en a pas fini avec ses lectures et ses recherches, que pour le lecteur dont l’intérêt risque de décroître à mesure qu’il avance dans ce dédale qui précède et qui suit le 27 mai 1942.
Je ne voudrais pas minimiser le travail fait par Laurent Binet, loin de là, car c’est un travail de titan qu’il a fait là afin de dresser le portrait d’un homme arriviste et cruel, dont le nom sera intimement et à jamais lié à la solution finale, puisque deux mois après son décès de blessures infectées infligées lors de la tentative ratée d’assassinat contre lui, on donnera le nom d’Aktion Reinhard au programme d’extermination de tous les Juifs de Pologne. Mais je ne peux mettre de côté le fait que souvent j’ai eu envie de sauter des pages. Mais je ne l’ai pas fait.
Le Goncourt du premier roman a été décerné à Laurent Binet pour ce premier roman, qui n’est pas vraiment un roman, mais le récit autour d’un projet de roman. Mérité ou pas? Ce n’est pas à moi, qui fuis en général les prix littéraires et notamment les prix Goncourt de toutes sortes, de le dire. Je dirai simplement que je ne suis pas mécontente d’avoir lu HHhH. Je dirai aussi que l’auteur a su dessiner un portrait de Heydrich plus solide que tout ce qu’on peut trouver ici et là, et que si HHhH avait été amputé d’une centaine de pages j’aurais sûrement trouvé davantage de plaisir à ma lecture.
Et de toutes les anecdotes relatées, je retiendrai celle-ci qui plaira aux mélomanes qui ne la connaissent peut-être pas. Heydrich, alors gouverneur du Protectorat de Bohême-Moravie, décréta qu’il fallait retirer du toit de l’Opéra de Prague la statue de Mendelssohn parce que celui-ci était Juif. Or, les soldats chargés de l’opération, ne connaissant rien à la musique et à Mendelssohn, s’attaquèrent plutôt à la statue de Wagner, trouvant que de tous les compositeurs sur le toit il était celui qui possédait l’appendice nasal le plus juif. Anecdote dont Jiri Weill a tiré le roman Mendelssohn est sur le toit, que je me promets de lire d’ici quelque temps.
Autrement dit, si les longueurs et les faux romans ne vous font pas peur, HHhH n’est pas dénué d’intérêt pour qui s’intéresse à la Seconde guerre mondiale et à la transformation d’un personnage historique en personnage de roman.
Titre pour le Défi Premier Roman