Lali

29 décembre 2011

Les vers de Cécile 6

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

Voilà que je me sens plus proche encor des choses.
Je sais quel long travail tient l’ovaire des roses,
Comment la sauterelle au creux des rochers bleus
Appelle le soleil pour caresser ses neufs
Et pourquoi l’araignée, en exprimant sa moelle,
Protège ses petits d’un boursicot de toile.
Je sais quels yeux la biche arrête sur son faon,
Tellement notre esprit s’éclaire avec l’enfant;
Je sais quels orgueils fous se cramponnent aux ventres,
Dans les nids, les sillons, les océans, les antres,
Quels sourds enfantements déchirent les terrains,
Quelles clameurs de sang s’élèvent des ravins.
Nous avons le regard des chattes en gésine
Quand le flux maternel nous gonfle la poitrine,
Quand l’embryon mutin bouge dans son étui
Comme un nouveau soleil sur qui pèse la nuit.
Nos seins lourds et féconds comme la grappe mûre
Offrent leur doux breuvage à toute la nature
Et notre obscur penchant voudrait verser son lait
À l’abeille, à la fleur, au ver, à l’agnelet.
Plaine grosse de sève et d’ardeurs printanières,
Écume salivant le désir des rivières,
Prunier croulant de miel, pesantes fenaisons,
Geste courbe et puissant des vertes frondaisons,
J’épouse la santé de votre âme charnelle
À présent que je vais forte comme Cybèle,
Que je suis le figuier qui pousse ses figons,
Qu’ayant connu l’essor hésitant du bourgeon
Et déployé la fleur où la guêpe vient boire,
Je m’achemine au fruit dans l’ampleur de sa gloire.
Le monde n’a plus rien de trop profond pour moi,
J’ai démêlé le sens des heures et des mois,
Et ma main qui s’arrête aux fentes des murailles
Sent dans le flanc du roc palpiter des entrailles.
Je n’aurais pas voulu, desséchant sur mon pied,
Être l’arbre stérile au tronc atrophié
Où l’abeille maçonne aurait creusé sa chambre,
Où quelque cep noueux gonflant sa grappe d’ambre
Aurait mis sur ma branche un air pâlot d’été
Sans que je participe à sa divinité.
Comme la riche nuit entre ses légers voiles
Voit dans son tablier affluer les étoiles,
Comme le long ruisseau abondant de poissons,
Je brasse en épis drus les humaines moissons.
Hommes, vous êtes tous mes fils, hommes, vous êtes
La chair que j’ai pétrie autour de vos squelettes.
Je sais les plis secrets de vos cœurs, votre front
Cherche pour y dormir mon auguste giron,
Et ma main pour flatter vos douleurs éternelles
Contient tous les nectars des sources maternelles.

Cécile Sauvage, Œuvres complètes

*choix de la lectrice de Christian Rohlfs

Une journée avec Monsieur Jules

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 19:17

Quand Alice se lève, ce matin-là, elle ne sait pas encore que Jules est mort. Elle le saura tout à l’heure quand les choses seront presque comme d’habitude, mais pas tout à fait. Le café sera prêt, oui, mais Jules ne sera pas à sa place habituelle, mais assis au salon, devant la fenêtre, comme s’il regardait danser les flocons. Mais son regard est vide, c’est là que la mort l’a trouvé.

Et maintenant, que faut-il faire? Appeler un médecin pour qu’il constate le décès? Son fils? Alice n’a pas envie de rien de cela, elle a encore trop de choses à dire à Jules qui ne lui en a pas laissé le temps. Plus tard sera bien assez tôt pour celle qui vient de voir sa vie basculer alors qu’elle avait toujours cru qu’elle partirait la première.

Une journée avec Monsieur Jules n’est pas une journée ordinaire. C’est sa dernière journée. Et Alice a bien intention d’en profiter, de se faire à la mort de Jules petit à petit. Mais il y a David qui va venir tout à l’heure, David, enfant autiste qui s’est attaché à Jules et à leurs habitudes, une partie d’échecs quotidienne, à 10 heures 30, précisément, pas plus tôt, pas plus tard.

D’un sujet grave, Diane Broeckhoven n’a pas fait un livre léger, mais un livre qui n’est pas lourd, un livre plein de tendresse, un livre sur la complicité de deux êtres tout aussi démunis l’un que l’autre qui ont choisi de vivre cette dernière journée sous le sceau d’un secret qu’ils vont partager. Juste eux. Personne d’autre. Demain, on verra.

S’il fallait un seul qualificatif pour parler de ce livre émouvant, je choisirais la délicatesse. Un art qui n’est pas donné à tous, mais que maîtrise à la perfection Diane Broeckhoven, Anversoise de naissance, qui a publié une trentaine de livres, mais dont Une journée avec Monsieur Jules est le premier traduit en français. Espérons que ça ne sera pas le seul.

Lu dans le cadre du Challenge « Littérature belge ».

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Rire ou pleurer?

Filed under: Revendications et autres constats — Lali @ 15:30

Je ne sais pas… mais je vais m’appliquer quand j’aurai fait mon choix, ça c’est certain! À moins que je ne propose mes services pour la révision de leurs documents? Non, non, j’aurais bien trop peur d’être mise en place!

Des roses bretonnes

Filed under: Signé Chantal,Vos traces — Lali @ 10:04

Pour donner un peu de couleur au blanc qui a envahi nos parterres, rien de mieux que des roses Paul Gauguin photographiées par Chantal il y a quelques mois, pas vrai?

Ce que mots vous inspirent 568

Filed under: Ce que mots vous inspirent,Couleurs et textures — Lali @ 8:00

Un bon capitaine transforme l’Atlantique en Méditerranée; un mauvais capitaine transforme la Méditerranée en Atlantique. (Amin Maalouf)

*toile de William Frederick Witherington