Tendre, triste, émouvant, souriant
C’est par une nouvelle intitulée « Première communion » que tout a commencé. La scénariste Julie Guerlan a en effet reçu pour celle-ci le Prix de la RTBF puis celui de la Communauté française de Belgique dans le cadre de « La Fureur de lire » avant d’en faire un magnifique roman éponyme paru en 2005 pour lequel on lui a remis le Prix Laurent Degraeve.
Première communion, par la tristesse qui y est évoquée avec beaucoup de tendresse, est un roman émouvant et souriant qui n’est pas sans rappeler le très beau film My life as a dog du réalisateur suédois Lasse Hallström qui met en scène un enfant qui accumule les malheurs, mais qui relativise tout en se comparant à la chienne Laïka envoyée dans l’espace, dont le sort était bien pire que le sien. C’est un peu ce que fait l’héroïne de Julie Guerlan aux prises avec une mère qui ne s’occupe pas beaucoup d’elle mais qui peut être merveilleuse quand elle y met le temps et l’énergie; un père qui émet des doutes sur le fait qu’il n’est peut-être pas son père biologique, mais qui sait être formidable lui aussi; une grand-mère qui a une phobie de la saleté et des microbes, mais à laquelle elle est très attachée; une petite sœur dont elle aurait parfois envie de se débarrasser, mais qui lui est essentielle, et quelques autres.
Tout cela donne lieu à des scènes souvent savoureuses, dont la plupart sont inspirées par la propre vie de la romancière qui, pendant des années, a noté sur des bouts de papier des morceaux d’enfance qu’elle a utilisés pour donner corps à l’histoire et aux personnages de ce roman doux amer qui nous transporte au cœur des années 70 dans une Belgique où la ligne de démarcation est bien distincte entre Wallons et Flamands.
Un beau, un très beau roman sur l’enfance, sur ses misères et ses joies, par une petite fille qui n’a pas froid aux yeux et à qui poser des questions ne fait pas peur. Un beau, un très beau premier roman, qui aura sept ans cette année et qui nous fait nous demander quand Julie Guerlan nous donnera le second. Ne serait-ce que pour des phrases pleines d’enchantement comme celle-ci :
Le chocolat me prive de tous mes mots parce que les papilles de ma langue se pâment de plaisir dans ma bouche, en oubliant tout leur vocabulaire.
Lu dans le cadre du Challenge « Littérature belge ».
Titre pour le Défi Premier Roman