Nous avions 17 ans
Nous avions 17 ans, 18 ans, et toute la vie devant nous. Nous faisions équipe en maths, en chimie, en physique, en biologie et en français. Nous jouions au badminton ensemble. Là où j’avais l’imagination, Louise avait les pieds sur terre. Combien de fois m’a-t-elle sortie de mes rêveries pour que je ne fasse pas de bêtise en labo de biologie ou de chimie ? Combien d’heures avons-nous passé au téléphone pour venir à bout d’exercices de physique ? Il y a sûrement encore dans ma boîte à souvenirs le dépliant du cegep où nous avions posé ensemble, en train de faire une pseudo expérience de physique optique. Je n’ai pas besoin de le chercher, je ferme les yeux et je retrouve intact cet instant.
Louise est à la fois dans mes souvenirs, comme dans la chronique nécrologique du journal d’hier, emportée trop vite par la maladie, à 44 ans. Il y a à la fois quelque chose de bien réel dans tout ça, mais d’intangible, aussi, comme je n’avais pas vu Louise depuis des années. Les mots annoncent sa mort, mais dans ma tête, elle m’explique un problème de maths 105.
J’avais pensé nous réunir tous et toutes il y a un an. J’avais commencé mes recherches et dans les personnes retrouvées à contacter, il y avait Louise. Et puis, je me butais à tellement de disparus que j’ai laissé tomber. Peut-être aurais-je appris la maladie de Louise. Peut-être, pas. La réunion des anciens n’a pas eu lieu, point.
Louise n’est plus.
Mais elle sera toujours vivante. Car j’aurai toujours 17 ans, quelque part dans ma mémoire.