Les vers d’Alphonse 1
C’est un vieux livre que la lectrice du peintre norvégien Even Ulving a sorti des rayons. Les forces, le recueil du poète Alphonse Beauregard, un des poètes membres de l’École littéraire de Montréal dont le plus connu est sans doute Émile Nelligan, a été publié en 1912. C’est l’édition originale qu’elle a parcourue, ce que vous pouvez faire aussi puisque le recueil est disponible en ligne, et c’est sur ces vers qu’elle s’est longuement attardée :
Sonnet impressionniste
Quelle âme revêtir dans cette forêt vierge
Qui va, grimpant les monts, au ciel donner assaut,
Où la terre a gardé l’empreinte d’un sursaut
Par quoi, depuis des temps fabuleux, elle émerge.
Arrière fatuité, loin de moi rire sot
Que l’on promène au bal, dans la rue ou l’auberge.
Comme si j’explorais quelque nouvelle berge,
J’aurai l’âme qui sied en face d’un berceau.
Ce bois évocateur de l’humaine origine,
Où la hache, plus tard, sonnera la ruine,
Écrira ma devise : Espérance et regret.
Si ma chair tremble et crie en la montée abrupte,
J’accuserai ma chair plutôt que la forêt;
Je serai désormais plus fort aux jours de lutte.