Lali

3 mars 2024

En vos mots 880

Filed under: Couleurs et textures,En vos mots — Lali @ 8:00

Alors que je viens tout juste de valider les textes déposés sur la toile de dimanche dernier, il est l’heure de vous proposer une nouvelle scène livresque à raconter en vos mots.

C’est sur une illustration de Nadezhda Goretovskaysa que mon choix s’est arrêté, en espérant que celle-ci vous inspirera quelques lignes. Comme le veut l’habitude, aucun commentaire ne sera validé avant dimanche prochain. Vous avez donc plus que le temps de faire vivre cette illustration.

D’ici là, bon début de mars et bonne semaine à tous les envosmotistes et à celles et ceux qui les lisent.

2 commentaires »

  1. Le chat regarde souvent par la fenêtre. Il peut y demeurer des heures, comme fasciné par mille choses attractives. Sylvette se demande ce qu’il voit et semble le captiver à ce point. Alors que pour elle il ne se passe rien et que la vue qu’elle en a reste figée et plutôt banale. Alors, aujourd’hui elle se poste au même endroit, et observe. Curieuse de ce que perçoit le chat. Elle est toujours si pressée dans le train de la vie, qu’elle ne regarde pas beaucoup autour d’elle. Et là, tout soudain, elle se trouve comme à la vitre d’un wagon, par laquelle elle voit défiler le paysage. Celui qu’elle découvre change à chaque instant. Cette évidence, qui a toujours échappé à son attention, ne se soustrait jamais à la vigilance du sage félin. Sylvette prend de lui une fameuse leçon. Une feuille tombe. Un oiseau se pose sur une branche, puis s’envole vers un muret. Une brise légère agite les branches. Toutes les herbes penchent. Des insectes divers vont de corolle en corolle. Les nuages changent à tout moment de forme. Et ne dirait-on pas des promeneurs, soudain, là sur la montagne? Un parfum tout à coup arrive, porté par le vent. Un parfum délicieux de printemps. Sylvette remercie la vie et remercie son chat pour le cadeau de ce voyage. Et elle ne regrette pas du tout d’avoir délaissé un moment ses livres.

    Comment by anémone — 4 mars 2024 @ 8:04

  2. Lisbonne, 10 mars 2024

    Ma chère B.,

    Je connais la couleur de tous tes dimanches gris amer à guetter par la fenêtre la venue d’un visage familier, qui viendrait pour te dire, d’une voix tendre et chaleureuse, que tu lui manques.

    Une voix qui te dirait des choses simples et banales. Est-ce que tu te nourris convenablement? Travailles-tu bien à l’école? Tu es bien sage?… Ces mots insignifiants auxquels, agacés, on ne prête plus attention, lorsqu’on les a souvent entendus, mais qui sont d’ineffaçables preuves d’amour pour ceux qui ne les entendent jamais. Ou si peu. Tellement peu qu’on voudrait pouvoir effacer ces souvenirs de ce que nous avons été.

    Puis, au bord des larmes, les dents et les poings serrés, tu entendais les rires moqueurs disant ce que tu savais déjà, à savoir que personne ne viendrait. Et tu regardais par la fenêtre juste comme ça. Pour rien. Pour passer le temps. Par curiosité. Par ennui.

    Certaine que le dimanche d’après ce serait celui que tu attendais depuis toujours. Je te vois, tes dessins de fleurs à la main. Fière. L’envie de lui dire que tu connaissais déjà, par cœur, la table de multiplication de 12. Tu l’as répétée dans ta tête toute la semaine. Lui dire que tu as appris les voyages maritimes, Vasco da Gama, Cabral, Magellan et les autres. Que la Terre est ronde et que le bout du monde existe. Pour de vrai. Quelque part.

    Et elle sera tellement heureuse qu’elle voudra te prendre dans ses bras pour te murmurer combien elle t’aime. Cette fois-ci, pas de doute, elle te le dira. Affectueusement. Et tu seras sa petite princesse.

    Puis d’autres dimanches sont venus. L’espoir déçu, debout à la fenêtre, jusqu’à ce que la buée envahisse ton cœur meurtri. La tristesse. La peur. Le désarroi. L’abandon.

    Je te vois, quelquefois, revivre cela. Comme un mauvais rêve qui se cacherait dans les pages d’Hervé Bazin, d’Hector Malot ou de Jules Brunin.

    Ma chère B., je sais tout ça. Je l’ai toujours su. Tellement su que je pourrais, les yeux fermés, écrire à l’encre des mêmes blessures les pages blanches de tes dimanches. Puisque j’ai pleuré les mêmes. Malgré la distance.

    Je t’embrasse.

    A.

    Comment by Armando — 9 mars 2024 @ 6:51

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